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476 LE KORAN.  
  1. Et nous lui aurions coupé la veine du cœur,
  2. Et nous ne l’aurions défendu contre aucun d’entre vous.
  3. Ce livre est une admonition pour ceux qui craignent Dieu.
  4. Nous savons qu’il en est parmi vous qui le traitent d’imposture.
  5. Ce livre est le désespoir des infidèles ;
  6. Car le Koran est la vérité même.
  7. Célèbre le nom de Dieu le Très-Haut.

CHAPITRE LXX.

LES DEGRÉS[1].


Donné à la Mecque. — 44 versets.


Au nom du Dieu clément et miséricordieux


  1. Un tel demande[2] un châtiment sans délai
  2. Pour les infidèles. Nul n’est capable d’empêcher
  3. Dieu de l’accomplir, Dieu, maître des DEGRÉS,
  4. Degrés par lesquels les anges et l’esprit montent vers lui dans l’espace d’un jour, dont l’espace est de cinquante mille ans[3].

  1. Le titre de cette sourate est pris du verset 3.
  2. Mot à mot : un demandant demande ; c’est un idiotisme arabe employé toutes les fois qu’on ne nomme pas la personne.
  3. Ce passage, traduit littéralement comme nous l’avons fait, veut dire simplement que les anges ont besoin d’un jour long de cinquante mille ans pour monter au trône de Dieu. On a vu, chap. XXXII, 4, que tout remontait vers Dieu dans l’espace d’un jour long de mille ans. Pour concilier ces deux passages, le savant traducteur anglais Sale pense que dans le chapitre XXXII il s’agit de l’ascension depuis la terre, tandis que, dans celui-ci, il peut être question de l’ascension à partir de la dernière échelle de la création. Cette explication est arbitraire ; dans tout le Koran il n’y a rien qui l’autorise, et l’on doit s’étonner que le traducteur anglais veuille y trouver autre chose qu’une expression hyperbolique. Mahomet n’était pas plus embarrassé pour donner aux journées de Dieu la durée de cinquante mille ans que celle de mille ans, et ce n’est pas sur des contradictions de ce genre que devrait s’exercer la critique du Koran. Les commentateurs, d’un autre côté, pensent que, dans le verset qui nous occupe, le jour de cinquante-mille ans est le jour du jugement dernier : nouvelle contradiction avec ce qu’ils disent sur la promptitude que Dieu mettra à juger le genre humain, savoir que la moitié d’une journée suffira à Dieu pour prononcer sur le sort des hommes. Dans ce cas-là les cinquante mille ans, selon les uns, sont les jours d’attente ; selon d’autres, c’est le jugement des nations infidèles qui absorbera tout ce temps ; il y en a cinquante, et chaque nation sera jugée pendant mille ans : les fidèles seront toujours expédiés dans une demi-journée. On peut juger, par cet exemple, choisi entre cent autres, de quelle valeur sont les commentaires, et il est incontestable que, pour tout ce qui ne regarde pas les pratiques religieuses, les coutumes des Arabes anciens et quelques points de l’histoire de Mahomet, les commentateurs n’ont fait souvent qu’embrouiller le sens du Koran et le charger d’une foule d’absurdités. Selon nous, il ne s’agit point, dans notre passage, du jour du jugement, mais bien de toute journée de Dieu. On n’a qu’à comparer ce verset avec le verset 44 du chap. XXXII, et voici ce qu’on y lit : « Dieu dirige toutes les affaires du ciel (du haut des cieux) à la terre (c’est-à-dire sans descendre sur la terre), et tout monte à lui dans le jour dont la durée est de mille ans de votre comput. » On voit que ces deux passages se tiennent, tant les expressions des deux sont analogues, tant ils s’expliquent mutuellement. Au chapitre XXXII, le sujet n’est pas nommé, il l’est au chapitre LXX. Ce sont les anges et l’esprit qui montent vers Dieu, et ce n’est pas au jour du jugement, car au chapitre XXXII il est dit : « Dieu dirige les affaires (de l’univers) du haut des cieux ; il les dirige par ses ministres, les anges, et c’est ce que dit plus explicitement le verset 4 du chapitre LXX. » Toute la différence entre ces deux passages git donc dans les mots cinquante mille ans ; mais cette expression, comme nous l’avons dit tout à l’heure, est simplement hyperbolique et ne saurait conduire à aucune autre induction. On peut comparer le verset qui est l’objet de cette note avec le verset 4, chapitre XCVII, où il est dit que les anges et l’Esprit (Gabriel) descendent avec les ordres de Dieu dans la nuit Alkadr.