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les plus agréables pour le visiteur et le visité.

Lorsque la mèche de la chandelle a des champignons noirs au sommet, cela annonce des visites.

VIT. — Qui ne vit ne vaut, c’est-à-dire qui ne mange pas ne saurait bien se porter. C’est le dicton que mon père répétait sans cesse à nos convives pour les engager à faire honneur au dîner.

VITAILLES, s. f. pl. — Victuailles. — Vitaille (de vitalia) est le vrai mot français et primitif, que les savants ont estropié en victuailles.

VITRIERS. — C’est le nom que l’on donnait aux chasseurs d’Orléans, aujourd’hui chasseurs à pied, à cause du sac noir sur le dos que l’on comparait à l’ustensile que les vitriers ambulants portent sur leur dos et où reposent leurs vitres.

Ce mot n’est pas proprement lyonnais, puisque nous le trouvons dans la pièce de Paul Déroulède, Chasseurs à pied :

Les petits Vitriers, c’est ainsi qu’on les nomme,
Ont mis leur baïonnette au bout de leur fusil…
(Chants du soldat, p. 37.)

VIVU, part. — Vécu. — Le mot a été fait sur vivre, mais il a sans doute été influencé par la terminaison u de vécu. Le bizarre est que, tandis que l’on avait vivu au lieu de vécu, on avait vicant au lieu de vivant.

VOCATION, s. f. — État, profession. Choisir une vocation, prendre une vocation. — C’est le vieux français vacation, profession, de vacare, où a a été remplacé par o sous l’influence de vocation, de vocare.

VOGUE, s. f. — Fête du village, qui coïncide avec la fête patronale. Puis le nom s’est étendu aux fêtes des faubourgs et des quartiers. — C’est une dérivation du franç. vogue, au sens d’abondance, affluence.

La Vogue des choux, Vogue de la presqu’ile Perrache, où il y avait jadis beaucoup de jardiniers.

VOGUEUR, s. m. — Non donné aux jeunes gens qui tiennent la vogue, c’est-à-dire qui, précédés d’un tambour-major, de tambours, d’une musique et d’une cantinière fringante qui s’est fait d’énormes appas, vont offrir, en échange d’une étrenne, une brioche aux bourgeois de la commune, organisent la fête, etc.

VOIE, s. f. — Une voie de charbon (de bois ou de pierre) comprend deux bennes (voy. ce mot). — Du latin populaire veha, chariot. Une voie de charbon, c’est littéralement une voiture de charbon.

VOILER (SE), v. pr. — Se dit d’une planche qui se gondole sous l’action de la température. — Ce mot, très bien formé sur voile, est tellement usité, que je ne m’explique pas que l’Académie ne l’ait pas recueilli.

VOIR. — Il faut voir venir. Dicton que les gens prudents ont constamment à l’esprit. Avant de rien décider, il faut tout voir, disait le sage aveugle.

Je ne peux pas le voir en peinture. Se dit de quelqu’un dont la présence n’est pas très agréable. L’idée est : « Je ne peux souffrir de le voir [même] en peinture. »

S’en voir, Avoir bien des misères. Le bon M. Ducerfe me disait : Quand ma femme m’a quitté, don pour aller avec M. Roupinet, que j’étais obligé de faire la soupe, ah ! c’est moi que je m’en suis vu, allez !

Ainsi tu vois bien. Locution dont on fait suivre un argument sans réplique. Paraît que t’as cané devant le Glaude. T’as eu peur. — Moi, j’ai cané ! moi, j’ai eu peur ! D’abord j’ai peur de personne, ainsi tu vois bien.

Dis donc, le grand Marius, on le voit souvent chez la Toinon. Y t’en fait porter. — Y m’en fait porter ! Justement, c’est moi qui lui en fais porter ! Ainsi tu vois bien !

VOIR, VOIRE. — Locut. qui, bien qu’explétive, ajoute quelque force au discours. Elle s’emploie dans des locutions comme celle-ci : Mecieu le médecin, voulez-vous voir ma langue ? — Voyons voir ! On lit communément dans cette phrase l’infinitif du verbe voir ajouté à l’impératif, ce qui serait une sottise. Le mot s’emploie d’ailleurs dans d’autres phrases dénotant sa vraie signification : Mélie, fais-moi voir passer mes ciseaux ! — C’est le latin verum, franç. voire.

VOISIN. — Plus m’est voisin le c… que la chemise (parlant par respect). Voy. chemise.