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Page:Le Ménestrel - 1896 - n°25.pdf/8

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LE MÉNESTREL

sa connaissance parfaite des ressources multiples du bel instrument construit par M. Krischer, a produit des effets inattendus et nouveaux, surtout dans l’improvisation sur un thème donné.

Mme Marie Roze a clôturé lundi dernier ses auditions musicales. Cela a été parfait, et on a pu constater les progrès accomplis par les élèves. À signaler au programme l’air d’Hérodiade (Vision fugitive), chanté par M. Cyrille Edwards l’air de Sigurd par le ténor Rivière, l’air de Lakmé par M. de Lacroix, la jolie mélodie de Dubois Par le sentier, dite par Mlle Lachause, « le Pourquoi » de Lakmé par Mlle Jeanne Wehrung, etc., etc., Mme Marie Roze a chanté elle-même, préchant d’exemple, l’Ave Maria de Gounod, une mélodie de Mme Ferrari et un duo de M. Lenepveu avec le ténor Rivière. Les cours ont un tel succès et sont tellement suivis que le professeur a décidé de les continuer tout l’été, sans vacances.

— À la soirée d’élèves donnée par Mme d’Hostingue-Bourlier, l’excellent professeur de piano, grand succès pour le maître Ch. Dancla, dans sa belle transcription du Nocturne de Chopin et dans sa Gazelle ; grand succès également pour M. Mazalbert, dans l’air de Joseph.

— La brillante école de M. A.-M. Auzende s’est vaillamment comportée dimanche dernier, dans une matinée consacrée aux œuvres de Beethoven. Les grandes pages du maître allemand ont été interprétées avec beaucoup de sûreté de style.

— On écrit d’Amiens : « Le festival organisé en l’honneur du compsiteur Henri Maréchal par l’ « Harmonie » de la ville, a été l’occasion d’un très grand succès pour le héros de la soirée, ses œuvres et ses brillants interprètes. Au programme, de nombreux fragments d’œuvres du compositeur : la Nativité, Déidamie, Calendal, les Vivants et les Morts, la Taverne des Trabans, et de nombreuses mélodies. On a beaucoup applaudi le baryton Auguez, le ténor Vergnet, et deux jeunes cantatrices, Mlles Baldo et Astruc, qui ont dû bisser plusieurs de leurs morceaux. Coquelin cadet était venu dire ses amusants monologues ».

— De Lille : « Le concert donné jeudi soir au Palais-Rameau par l’orchestre des Concerts d’été a été de tous points très réussi. L’excellent orchestre, sous la direction de M. Oscar Petit, a joué avec beaucoup de brio et de goût les différents morceaux inscrits au programme. M. Cornubert, premier ténor de l’Opéra-COmique, ancien pensionnaire de notre Grand-Théâtre, prêtait à ce concert le concours de sa voix, d’une si belle sonorité, conduite avec une science et un art qu’on rencontre bien rarement aujourd’hui. Il a chanté de façon exquise, avec un souci des moindres nuances, la cavatine de Roméo et Jueliette, la Belle du Roi, d’Augusta Holmès, Voisinage, de Cécile Chaminade ; enfin il a dit de façon magistrale le récit du Graal, de Lohengrin. Le public a fait fête au distingué artiste. »

— À la matinée d’élèves que donne annuellement, chez Érard, Mme Lafaix-Gontié, l’interprétation s’est montrée constamment bonne et souvent supérieure. Quantité de jolies choses au programme, qu’il serait impossible d’énumérer toutes. Comme chœurs, on a beaucoup remarqué l’exquis Chant des fées de Paul Vidal, si bien rendu par les trois fées : Mlles Gabrielle D. du S., Hortense D. et Hélène P., ainsi que par les voix d’accompagnement qui ont produit un grand effet. Très amusante et trais gaiement chantée, la ronde des Muguets et Coquelicots (Blanc et Dauphin), par de tout jeunes garçons que dirigeait Mlle Antoinette Lafaix-Gontié.

— Belle et intéressante matinée aussi chez M. Raoul Delaspre, pour la majeure partie consacrée à l’audition des œuvres de Théodore Dubois. Parmi celles-ci on a trissé la Tarentelle, fort bien chantée par Mlle Lafon, et la délicieuse mélodie : Près d’un ruisseau, dite à ravir par Mme Chrétien-Vaguet. Citons encore la Chanson de la grive de Xavière, Par le sentier, le Baiser, Trimazo. Dans la partie pianistique, Mlle Renesson a véritablement triomphé avec la Sérénade à la lune de Raoul Pugno, et la Danse rustique de Th. Dubois. On a fini par le deuxième acte de Lakmé, joué en costumes par Mme de Marthe, MM. Viannenc et Lecomte. Grand succès pour tous.

— Au quatrième et dernier concert de la saison dans l’hôtel de la rue Antoine-Boucher, Mme Dignat a fait apprécier son jeu fin et délicat dans le quatuor en sol mineur de Mozart, où elle avait pour partenaires MM. Alf. Brun, de l’Opéra, Papin et Queeckers. Grand succès pour Mme Dress-Brun, dans des romances de Bourgault-Ducoudray et de Rubinstein ; belle exécution d’un trio de Mendelssohn (op. 66) ; mais surtout triomphe éclatant pour la sonate de César Franck, pour piano et violon, qui a été jouée supérieurement par Mme Dignat et M. Alf. Brun.

— Toujours continuation des succès de Mlle Bressolles avec les Chansons grises de Hahn qu’elle a chantées, cette semaine chez Mme Staaf, puis chez Mme Allouard, avec le même succès de délicatesse qu’elle obtient partout.

NÉCROLOGIE

Un artiste de grande modestie, quoique d’un talent certain, vient de s’éteindre à l’âge de 52 ans. Léon Delahaye, qui était professeur d’accompagnement au Conservatoire et chef des chœurs à l’Académie nationale de musique, fut en effet un compositeur de mérite. Il laisse un nombre de compositions pour le piano d’une rare élégance et d’un style fort distingué, telles que les Révérences, l’Hommage à Rossini, Sous les saules, Colombine, les Océanides, etc., etc. Il fit même représenter à l’Opéra-Comique, dans les premières années de sa jeunesse un opéra dont le titre nous échappe, mais qui abondait en mélodies gracieuses. Le succès en fut cependant négatif, à cause de l’insignifiance du sujet et aussi du côté trop pianistique de la partition. Comme professeur et comme chef des chœurs, il fut l’homme des traditions sérieuses. Il était de caractère droit et tout d’une pièce, de relations sûres, et sera fort regretté de tous ceux qui l’ont connu et approché. Une des dernières lettres qu’il ait écrites aura été certainement celle qu’il nous adressait le 21 mai, à la veille de la représentation de gala donnée à l’Opéra, au profit du monument d’Ambroise Thomas, alors qu’il était déjà sur son lit de douleur, rongé par le cancer qui le dévorait :

« 
Le Vésinet, 21 mai 1896.

C’est un grand chagrin pour moi, mon cher ami, de ne pouvoir être à mon poste ce soir, apportant mon respectueux tribut d’hommages à la mémoire vénérée de mon cher maître Ambroise Thomas.

Obligé de suspendre mes fonctions, depuis quelque temps déjà, par une assez grave indisposition, je ne veux pas laisser passer la solennité d’aujourd’hui sans vous adresser ce petit mot de souvenir et une cordiale poignée de mains.

Léon Delahaye.
Chef des chœurs à l’Opéra.
 »


Tout Delahaye est là : artiste de devoir et de souvenir.

— Dimanche dernier est morte à Paris, âgée de 74 ans, Mme Dufresne, née Demay. Ancien professeur d’harmonie au Conservatoire, Mlle Catherine-Célina-Caroline-Emma Demay était née à Paris le 29 juillet 1822. Admise de bonne heure au Conservatoire, elle y obtient un second prix de solfège en 1838, et deux ans après, en 1840, le premier d’harmonie et accompagnement. Dès l’année suivante elle était nommée répétiteur d’une classe préparatoire d’harmonie pour les femmes, quelques années plus tard, devenue Mme Defresne, elle prenait le titre de professeur-adjoint, et enfin, en 1851, elle devenait titulaire d’une classe d’harmonie. Mme Dufresne, dont la classe, excellente, avait fourni de nombreux lauréats, avait pris sa retraite après quarante années de services, aux environs de 1880, et non en 1876, comme on l’a dit, car sa classe obtenait encore des nominations en 1877 et 1878.

— Annonçons la mort, à Brest, d’un artiste distingué, M. Barthélemy Chalmet, qui tient, durant de longues années, les orgues de Saint-Louis de cette ville. Outre son grand talent d’organiste, il était de plus un compositeur de mérite. Quelques pièces de piano, comme le Pardon en Bretagne et les Vagues, valent qu’on les signale.

— À Vienne est mort, à l’âge de 68 ans, M. Joseph Dachs, professeur de piano au Conservatoire, qui avait été élève de Czerny. C’était un des meilleurs pianistes de l’Autriche, et depuis 1860, époque où il entra comme professeur au Conservatoire, il a formé nombre d’élèves excellents. Dans sa jeunesse, il donnait souvent des concerts avec beaucoup de succès.


Henri Heugel, directeur-gérant.

On achèterait piano Érard dem. queue pas vieux, 6, r. Villersexel. Duber.