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AUX PHLOX
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peu de temps et tombent, jonchant les jardins, jonchant les bois, jonchant la rue, jonchant le fond du lac où tristement elles se noient.

Les pauvres feuilles ! Elles étaient si belles, si indiciblement belles. Elles faisaient des arbres les plus splendides bouquets du monde et, avec ces bouquets, tendaient sur les montagnes une inimitable tapisserie.

Qui aurait osé parler de la mélancolie de l’automne ?

L’automne était l’apothéose de toutes les saisons, l’automne réunissait toutes les couleurs, toutes les richesses, toutes les pierreries même. Car le ciel, et le lac, et la petite rivière au fond de la vallée creusée entre les formidables et flamboyantes montagnes, tout cela devenait bleu comme des turquoises, du lapis lazuli.

Ah ! c’était beau, je vous le jure, l’automne sur ce merveilleux pays, l’automne vu de notre village haut perché.

C’était beau, il y a dix jours, c’était encore beau hier. Nous avons traversé la forêt montante, quitté le paysage de lac, de champs, de maisons étagées aux flancs escarpés des collines, pour ne plus voir que ce qui semblait une belle avenue dans un beau bois d’érables, de hêtres, d’ormes et de bouleaux.

Ah ! le feuillage tendre de ces bouleaux. Et ces érables qui se dressent à part des autres,