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AUX PHLOX
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et sa langue miraculeusement se délie. Lorsqu’elle n’entraine pas son interlocuteur trop loin, nous la voyons adroitement amorcer la conversation, l’incliner vers le sujet que nous avons discuté et, ingénument, servir le meilleur de nos opinions. S’il s’agit de livres, bien fin serait celui qui découvrirait ses pas hardis, sa témérité en terrain inconnu. Elle n’a pas lu ceux dont elle parle. Elle ne les a pas lus, mais qu’importe, puisque les autres les ont lus et en ont parlé devant elle ? Elle enregistre si bien que nous sommes forcées de reconnaitre que tout y est : l’accent de conviction, le goût personnel, les boutades…

Plus encore : nous, les femmes, nous ne la trouvons pas intelligente ; mais de nouveau nous avons tort. Elle l’est plus que nous, à sa façon. Nous avons vu de ses lettres ; elle écrit bien, très bien, et c’est beaucoup plus spirituel que ce que chacune de nous peut produire ; comme dans la conversation, elle utilise les mots entendus… Pour les relier, les bien présenter, nulle jamais ne la surpassera ; on dirait qu’ils sont tous d’elle.

C’est un charme ; elle est captivante, et nous comprenons que les hommes volontiers courent à elle avant de nous rechercher. Cultivée, spirituelle, élégante, originale, que faut-il de plus ? Et puis, quand elle parle à un homme,