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LA MONTAGNE D’HIVER

La jeune religieuse fit la roue, mais beaucoup plus naturellement et plus vite qu’un mannequin, en disant :

— Il est beau, notre costume, ne trouvez-vous pas ? Moi je l’aime bien…

Louise revoyait son pur visage dans le cadre blanc de la grande coiffe amidonnée. Elle était belle surtout à cause de la joie de son regard.

Tous les matins, la jeune religieuse ramenait avec elle l’espoir, pour Louise que déprimaient sa faiblesse et le temps maussade et sombre.

Puis enfin, le jour se leva lumineux, et la petite Sœur fit irruption dans la chambre avec un air encore plus joyeux. Elle remit de l’ordre, poussa le petit banc d’un air malicieux, se posta à la fenêtre en disant :

— Le gazon est enfin découvert. Cette nuit, la neige a beaucoup baissé. Et pourtant, l’air est froid et vif, comme bleu !

Rêveuse, elle ajouta :

— Moi, un jour comme aujourd’hui, j’aimerais à marcher dehors, longtemps, longtemps, longtemps…

— Et pourrez-vous sortir ?

— Ah ! Un petit peu, à midi, dans le jardin. Mais ce n’est pas cela que j’aimerais. Je voudrais marcher loin, loin, loin…

Et elle regardait le ciel du levant rose comme une porte ouverte sur le bonheur.


Le lendemain avait été le dernier jour de Louise à l’hôpital. La jeune religieuse entra toujours joyeuse.

— Cette fois, avouez-le, je vous ai éveillée. Nos savates, nos jupes, nos chapelets, ça fait tout un carillon !

Il était évident que ce carillon, elle l’aimait aussi.