Page:Le Parnasse contemporain, II.djvu/156

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Bien avant qu’apparût entre les deux grands frênes,
Au détour du lavoir bordé de marjolaines,
Le toit pentif, accent jeté sur l’horizon.
Une clameur pareille au bruit des mers prochaines
M’annonçait de loin la maison.

Car la maison couvait la tempête infinie.
La fermière en était l’irritable génie ;
Elle parlait si haut ! — (pardon, je me trompais)
Elle criait si fort ! — Aussi, par ironie,
L’appelait-on Dame la Paix.

Par elle tout bougeait, grouillait, faisait merveille ;
Si la poule en son nid, comme en ses fleurs l’abeille,
Si la vache à l’étable, au bercail le mouton,
Gloussait, bêlait, bramait & bourdonnait, l’oreille
Devinait qui donnait le ton.

Au fond (le dehors ment & le fond seul importe)
C’était un brave cœur — servi d’une voix forte,
Et le cœur pour la voix vous demandait pardon
Quand, de l’air dont une autre eût dit : « Passez la porte ! »
Elle vous criait : « Entrez donc ! »

Dès le seuil on tombait en plein remû-ménage ;
Le sarment crépitant, la poêle faisant rage,
L’étain sonnant, les plats tintant sur le dressoir,
Rendaient à leur manière un bruyant témoignage
De son zèle à vous recevoir.