Page:Le Parnasse contemporain, II.djvu/254

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Contre les flots grossis l’embarcation lutte ;
Mais bientôt contournant son énorme volute,
La houle, dans un pli de son blanc chapiteau,
A saisi les marins & tordu le bateau.
Sur le gouffre nageant, rares, ils apparaissent,
Mais les flots en fureur de toutes parts les pressent.
Cette nuit, ils ont beau tendre & roidir leurs bras,
Leurs lits seront faits d’algue, & d’écume leurs draps.
Sous un glauque suaire, au bruit sourd des tempêtes,
Un oreiller de sable endormira leurs têtes.
Le dernier, pour finir un supplice trop long,
Plonge comme une sonde à la suite du plomb.

Le jeune homme a tout vu, mais que le regard change !
Le démon se tordant sous le pied de l’archange,
L’aspic coupé qui cherche à ressouder ses nœuds
N’ont pas dans la prunelle un éclair plus haineux ;
Et cependant, avec d’irrécusables teintes,
Sur ses beaux traits l’horreur & la pitié sont peintes ;
Sa poitrine oppressée éclate en sourds sanglots.
Il descend au rivage, &, le pied dans les flots,
Faisant fuir de ses cris les mouettes effarées,
Agite éperdument ses mains désespérées !…