Page:Le Parnasse contemporain, II.djvu/55

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Jeanne au beau front par le doute obscurci
Est la plus fière, & Lucy la plus douce.
Dans le jardin, sur un tapis de mousse,
Nous devisons comme des écoliers ;
Ce sont parfois des contes par milliers,
Puis je sertis de folles rimes, voire
Des madrigaux pour leurs petits souliers,
Et Marinette est là qui verse à boire.

Lucy me fait songer & Jeanne aussi ;
Et qu’un rayon de lumière éclabousse
Le front vermeil de Lise, me voici
Charmé : l’Amour, ayant vidé sa trousse,
Trouve à souhait des traits que rien n’émousse
Dans ses grands yeux pensifs & singuliers.
Lucy soupire & me dit : Vous parliez,
Parlez encor ; trouvez-nous quelque histoire.
Le soleil rit sur les blancs escaliers,
Et Marinette est là qui verse à boire.

Lise est ma joie & mon plus cher souci ;
Lucy m’attire & Jeanne me repousse ;
Mais je l’adore, & j’ai le cœur transi
Dès qu’elle pleure & qu’elle se courrouce
Pour un baiser sur l’ongle de son pouce.
Puis en jouant avec ses lourds colliers,
Je dis à Lise : Enfant, si vous vouliez !
Elle répond : Ami, songe à la gloire.