Page:Le Petit - Les Œuvres libertines, éd. Lachèvre, 1918.djvu/47

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

d’intervalle, alors que pour l’Escole de l’Interest il était de près de deux mois et six jours.

Nous entrons dans la période critique de la vie de Claude, est-ce une manifestation de cynisme, est-ce simplement un dernier adieu à un intime que son sonnet sur le supplice d’un sodomite : Jacques Chausson, dit des Estangs ?

Amis, on a brûlé le malheureux Chausson,
Ce coquin si fameux, à la tête frisée ;
Sa vertu par sa mort s’est immortalisée :
Jamais on n’expira de plus noble façon.

Il chanta d’un air gai la lugubre chanson
Et vêtit sans pâlir la chemise empesée,
Et du bûcher ardent de la pile embrasée,
Il regarda la mort sans crainte et sans frisson.

En vain son confesseur lui prêchoit dans la flamme,
Le crucifix en main, de songer à son âme :
Couché sous le poteau, quand le feu l’eut vaincu,

L’infâme vers le Ciel tourna sa croupe immonde ;
Et, pour mourir enfin comme il avoit vécu,
Il montra, le vilain, son cul à tout le monde.

Ce Chausson, autrefois commis à l’Hôtel des Fermes du roi, avait été incarcéré le 21 août 1661 pour tentative de viol sur un jeune garçon ; l’affaire se compliquant d’autres viols, le 25 août on arrêta également un de ses anciens collègues, Jacques Paulmier, dit Fabry. Tous deux furent condamnés le 25 novembre à avoir la langue coupée et leurs corps brûlés. La sentence était confirmée par le Parlement le 29 décembre 1661[1] et l’arrêt exécuté immédiatement sans qu’ils aient été préalablement étranglés au poteau.

  1. Nous donnons à l’Appendice qui suit la reproduction de ses œuvres libertines le texte de la sentence du Chatelet, leurs interrogatoires devant le Parlement de Paris et l’arrêt du Parlement du 29 décembre 1661. Ce dernier était imprimé par Louis Barbote et mis en vente dès le 31 décembre. Une partie des pièces de ce procès est reproduite dans le Ms. Fr. 10969 de la Bibl. nat. Ces documents établissent sans contestation possible que les deux condamnés non seulement pratiquaient la sodomie, mais qu’ils fournissaient des sujets à de nobles personnages : le baron de Bellefore et le marquis du Bellay. Ils ont fait des aveux, puis ils ont nié. Chausson arrêté le 21 août 1661, âgé de 43 ans et demi, qui demeurait rue Saint-Antoine proche la rue Vieille-du-Temple, vivait de ce métier depuis deux ans et demi, il avait autrefois été commis à l’Hôtel des Fermes du roi. Jacques Paulmier, dit