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sont souvent sortis, en France plus qu’ailleurs, en s’écartant des anciennes traditions et de la pratique actuelle des peuples prospères et libres. Ils ont beaucoup aidé à l’invasion du mal ; et, de nos jours encore, ils combattent plus qu’ils ne servent la cause de la réforme. Les abus que je signale se sont produits dans le passé, et ils agissent encore à divers degrés sous trois formes principales.

Le premier abus, dans l’ordre des temps, a été l’amoindrissement systématique des libertés privées et locales du moyen âge. En tête des libertés naturelles, nos ancêtres de cette époque plaçaient, comme tous les peuples libres le font encore aujourd’hui, le droit qu’ont les citoyens de régler eux-mêmes les intérêts spéciaux des individus, des familles, des paroisses, des communes urbaines et des départements ruraux, c’est-à-dire ceux qui ne touchent en rien aux intérêts généraux de la province et de l’État. Ce droit, librement exercé pendant la grande époque d’organisation de l’Europe chrétienne (§ 14), donna naissance à des coutumes locales qui exerçaient sur les populations une autorité morale bien supérieure à celle des lois écrites de notre temps. Ces coutumes, en effet, sont créées par les individus, les familles et les autonomies locales. Elles se modifient spontanément dès que les besoins changent ; et, en