clame en politique une égalité absolue, serait fort inquiet si tous les citoyens étaient appelés indistinctement à décider une action judiciaire d’où dépendent sa fortune, sa vie et son honneur.
En voyant chez nous tant d’hommes afficher une doctrine contraire à la pratique universelle, j’ai d’abord été tenté de croire qu’à cet égard la France se distingue des autres nations par une inclination qui lui est propre. Mais de longues recherches[1] n’ont point justifié cette prévision. J’ai même constaté que mes concitoyens sont beaucoup plus portés que tout autre peuple européen vers les habitudes d’inégalité[2], et même vers celles qui sont le moins justifiées par l’expérience et la raison. Au nombre des entraînements condamnés par les plus sages préceptes de l’égalité, nos émules remarquent surtout avec étonnement : la pratique générale de l’usurpation des titres de noblesse, et l’engouement ridicule que montrent les nouveaux enrichis pour les titres ainsi usurpés[3] ; les ardentes convoitises manifestées sans relâche devant ceux qui interviennent dans la distribution des ordres de chevalerie, français ou étrangers[4] ; la répugnance pour les corporations libres qui, chez nos émules, réunissent tous les esprits