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sortit la confédération américaine, cette prépondérance persista dans les mœurs privées, malgré le fâcheux ébranlement que leur imprima la réaction, dirigée avec succès contre l’intolérance des puritains par Jefferson, Franklin et les autres partisans des doctrines sceptiques et utilitaires de l’Europe. Depuis lors, les germes d’erreur, semés par l’ascendant personnel de Jefferson pendant soif gouvernement de huit années, se sont développés au détriment de la religion et de la famille, car s’ils ont trop exagéré l’esprit de nouveauté, ils n’ont point enlevé aux hommes de tradition la liberté de bien faire. Le mal a donc gagné du terrain depuis le temps de Jefferson : dans la vie privée, l’accumulation des richesses a produit ses conséquences ordinaires ; dans la vie publique, le peuple des agglomérations urbaines ne se montre pas toujours capable de choisir les « vrais aristocrates[1] »,

  1. « Je considère l’aristocratie naturelle comme le don le plus précieux que nous fasse la nature, pour l’instruction de la société, pour la direction et le maniement de ses affaires… La meilleure forme de gouvernement est celle qui pourvoit avec efficacité à ce que les fonctions publiques soient exclusivement confiées à ces aristoï naturels. Je crois que le meilleur remède est… de laisser aux citoyens le soin de séparer par des élections libres les aristoï des pseudo-aristoï… Les hommes de nos États peuvent avec sécurité se réserver à eux-mêmes un contrôle salutaire sur les affaires publiques et un degré de liberté qui, dans les mains de la canaille des villes d’Europe, serait bientôt employé à la destruction des intérêts publics. » (Conseil, Mélanges politiques de Jefferson, t. II, pages 213 à 240.)