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thèque sociale en me chargeant de réagir par un livre contre les divers préjugés nationaux auxquels il se heurta successivement, et qui s’opposèrent en définitive, sous son règne, à la réforme sociale de la France[1].

    conditions, cette réforme est urgente ; mais, pour l’opérer, il faut être à la fois patient et tenace. Il faut se garder d’enfreindre, en vue de cette urgence, les bonnes traditions qui se conservent. L’alliance du travail agricole et du travail manufacturier est une coutume, bienfaisante, en ce qu’elle allège, pour les patrons ruraux, les charges que leur impose le service régulier du pain quotidien. Toutefois cette coutume n’a qu’une importance médiocre dans les contrées où l’esprit de patronage a disparu. Or la conservation de l’esprit de patronage implique la permanence, héréditaire des rapports qui unissent la famille du maître à celle des ouvriers. En France, cette permanence ne sera donc rétablie que par la réforme qui rendra au père de famille, le pouvoir de transmettre, intégralement à ses descendants le domaine et les autres instruments de travail qu’il a reçus de ses ancêtres.
    J’offris au surplus à l’Empereur de mettre ces vérités en pleine lumière par une enquête. L’Empereur, ayant accepté, cette proposition, chargea M. Schneider, vice-président du Corps législatif, et M. Rouher, ministre de l’agriculture, du commerce et des travaux publics, d’y donner suite conjointement avec moi. L’enquête fut achevée en un mois dans tous les départements : elle justifia mes prévisions et elle accrut la confiance de l’Empereur dans la méthode d’observation. La monographie du savonnier de Marseille fut un élément du rapport soumis à l’Empereur à la suite de l’enquête. (O m. 1861, III, et O e. 1877, IV.)

  1. Les trois ouvrages principaux qui figurent dans la Bibliothèque me furent réclamés sans relâche par l’Empereur et l’Impératrice, savoir : la Réforme sociale, après les deux mécomptes de 1858 ; l’Organisation du travail et l’Organisation de la famille, après le mécompte de 1865, lorsque le Corps législatif eut rejeté le projet présenté par le baron de Veauce, pour la restauration de l’autorité paternelle, fondée sur la liberté du testament. Ce projet fut soutenu seulement par quarante-deux députés. J’ai signalé les noms de ces députés dans tous mes écrits, afin que nos descendants honorent leur mémoire.