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Page:Le Présent, année 1, tome 1, numéros 1 à 11, juillet à septembre 1857.djvu/121

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L’ANNÉE DES COSAQUES.
PREMIÈRE PARTIE. — LA CHAMPAGNE.
VII. — SOUS LES MARRONNIERS.

L’explication de tous ces faits est bien simple et n’a rien de romanesque. Madame de Lautages dans sa vie de voyages avait fini par se fixer en Russie, et c’était de Saint-Pétersbourg même qu’elle était revenue habiter le château de ses ancêtres. Là, elle avait fait connaissance avec la princesse Bariatinsky, mère de Georges ; la liaison des mères avait amené celle des enfants ; Clotilde avait à peu près le même âge que Georges ; tous deux étaient riches et nobles, et l’idée d’une union plus intime entre les deux familles était sortie naturellement de leur mutuelle tendresse. Il avait été décidé toutefois que cette union n’aurait lieu qu’après la campagne qui s’ouvrait, celle de 1813. Georges, par la noblesse de sa naissance, était appelé à servir son pays, et il était parti à la suite de l’empereur Alexandre qui l’aimait et l’avait attaché à son état-major. L’empereur avait même été instruit des projets de mariage entre le prince et la jeune comtesse, et il avait promis d’y donner sa haute approbation au retour de la campagne. Georges avait donc fait à sa suite la guerre d’Allemagne ; il avait combattu contre nous à Leipsick, avait passé le Rhin et était venu tomber près de Saint-Just, sous les coups d’un fantassin français.

Grande avait été la douleur de la marquise et de sa fille quand un exprès dépêché du quartier-général d’Alexandre était venu leur apporter une lettre autographe de l’empereur qui leur annonçait la mort de Georges ; grande aussi leur joie quand, en dépit de cette lettre, elles retrouvèrent Georges vivant et plein de santé. Un point cependant inquiétait madame de Lautages ; c’était le mot mariage prononcé par Pierre Jarry. Elle insista pour que Georges prit un repos nécessaire, elle fit venir immédiatement un paysan, et se fit raconter la scène de la