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LE PRÉSENT.

vres que je puiserai tout à l’heure les exemples les plus éclatants, quand j’en viendrai à donner une série d’applications des principes ci-dessus énoncés et à coller un échantillon sous chaque titre de catégorie.

D’ailleurs, nous trouvons dans le comique absolu et le comique significatif des genres, des sous-genres et des familles. La division peut avoir lieu sur différentes bases. On peut la construire d’abord d’après une loi philosophique pure, ainsi que j’ai commencé à le faire, puis d’après la loi artistique de création. La première est créée par la séparation primitive du comique absolu d’avec le comique significatif ; la seconde est basée sur le genre de facultés spéciales de chaque artiste. Et, enfin, on peut aussi établir une classification de comiques suivant les climats et les diverses aptitudes nationales. Il faut remarquer que chaque terme de chaque classification peut se compléter et se nuancer par l’adjonctiond’un terme d’une autre, comme la loi grammaticale nous enseigne à modifier le substantifpar l’adjectif. Ainsi, tel artiste allemand ou anglais est plus ou moins propre au comique absolu, et en même temps il est plus ou moins idéalisateur. Je vais essayer de donner des exemples choisis de comique absolu et significatif, et de caractériser brièvement l’esprit comique propre à quelques nations principalementartistes, avant d’arriver à la partie où je veux discuter et analyser plus longuement le talent des hommes qui en ont fait leur étude et leur existence.

En exagérant et poussant aux dernières limites les conséquences du comique significatif, on obtient le comique féroce, de même que l’expression synonymique du comique innocent, avec un degré de plus, est le comique absolu.

En France, pays de pensée et de démonstration claires, où l’art vise naturellement et directement à l’utilité, le comique est généralement significatif. Molière fut dans ce genre la meilleure expression française ; mais comme le fond de notre caractère est un éloignementde toute chose extrême, comme un des diagnostics particuliers de toute passion française, de toute science, de tout art français est de fuir l’excessif, l’absolu et le profond, il y a conséquemment ici peu de comique féroce ; de même notre grotesque s’élève rarement à l’absolu.

Rabelais, qui est le grand maître français en grotesque, garde au milieu de ses plus énormes fantaisies quelque chose d’utile et de raisonnable. Il est directement symbolique. Son comique a presque toujours la transparence d’un apologue. Dans la caricature française, dans l’expression plastique du comique, nous retrouverons cet esprit dominant. Il faut l’avouer, la prodigieuse bonne humeur poétique nécessaire au vrai grotesque se trouve rarement chez nous à une dose égale et continue. De loin en loin, on voit réapparaître le filon ; mais il n’est pas essentiellement national. Il faut mentionner dans ce genre quelques intermèdes de Molière, malheureusement trop peu lus et trop peu joués, entre autres ceux du Malade imaginaire et du Bourgeois gentilhomme, et les figures carnavalesques de Callot. Quant au comique des Contes de Voltaire, essentiellement