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Page:Le Présent - Tome deuxième, 1857.djvu/22

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LE PRÉSENT.

la société, et la mise en ordre des institutions retigieuseï et civiles qui concordaient le mieux avec les changements apportés dans cette société par la conquête, l’accroissement de la population et le développement du culte. Ces règles, ces institutions d’abord concises et solennelles comme le Décalogue et les lois des Douze Tables, arrivèrent, avec le temps, à atteindre les proportions du livre de Manou, grand code civil et religieux, qui est venu jusqu’à nous témoigner de cette première science religieuse et sociale. Comme ce code a encore force de toi pour cent quarante millions de nos semblables, il est bon de ne jamais oublier en quels termes les législateurs y ont spécifié les devoirs et les droits de chaque caste.

Manou, liv. III sl 88. « L’Être existant par lui-même donna en partage aux Brahmanes, qu’il tira de sa tête, l’étude et l’enseignement des Védas, l’accomplissement du sacrifice, la direction des sacrifices offerts par d’autres, le droit de donner et celui de recevoir. »

89. « Il imposa aux Kchattryas, qu’il tira de son bras, la fonction des armes, l’exercice de la charité, du dévouement, la lecture des livres sacrés et la tempérance dans les plaisirs des sens. »

90. « Le soin des bestiaux, l’aumône, le sacrifice, l’étude des livres saints, le commerce, le prêt à intérêt, la culture de la terre, sont les fonctions que Brahma alloua aux Vaiçyas, qu’il tira de son ventre, s

91. « Mais le souverain Maître n’assigna aux Coudras, issus de ses pieds, qu’un seul office, celui de servir les classes supérieures, sans déprécier leurs mérites. »

Quelques érudits de notre temps, même de ceux qui ont vécu dans l’Inde, en étudiant l’application actuelle de ces prescriptions antiques parmi les Indous modernes, ont été conduits à se demander si la haute part sociale faite aux Brahmanes parle Manava-Çastra n’avait pas été la formule d’un vœu du législateur, plutôt que l’expression d’un’fai réel ? Nous ne pouvons partager cette opinion ; trop de monuments de l’âge héroïque des Indons font foi de l’orgueilleuse suprématie exercée à cette époque par la caste sacerdotale et avouée ouvertement par toutes les autres, pour que nous croyions devoir insister sur ce point. Mais, d’un autre côté, on doit reconnaître que la force des choses, que les nécessités du maintien de la race aryane au milieu de ses conquêtes, et que son salut même, ne tardèrent pas à amener, en faveur de la caste guerrière, une réaction qui replaça celle-ci au premier rang de la société