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Page:Le Présent - Tome deuxième, 1857.djvu/237

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REVUE DES COURS PUBLICS

L’ENSEIGNEMENT ET LES LIVRES.

Leibnitz disait. « Celui qui est maître de l’éducation peut changer la face du monde. » Cette grande vérité suffirait à nous prouver l’importance que doivent prendre à tous les yeux les cours publics, l’enseignement supérieur et secondaire, et la science distribuée publiquement par les bouches les plus autorisées ou les plus éloquentes dans nos grands établissements d’instruction publique. Je me trompe : cette importance est comprise de plus en plus. L’enseignement des facultés est fort suivi, surtout à Paris, et il y a des fanatiques de tel ou tel professeur qui ne céderaient pas volontiers leur place à la Sorbonne ou au Collège de France. C’est à peine s’ils pardonnent au maître quelques semaines de vacances, et le mois de décembre, en ramenant l’idole à sa place, ramène en même temps ses dévots avec un surcroît de prosélytes, de néophytes et de curieux. Cette faveur de l’enseignement public, qui s’accroît évidemment, s’explique par des mécomptes d’esprit subis ailleurs. Il y a, soit dans nos théâtres, soit dans les livres qui foisonnent autour de nous, des traces nombreuses de corruption ou de décadence. Il y a un style malsain qui prend la place du beau, et un mauvais goûtqui se drape en usurpateur. Les exceptions, sans doute, se rencontrent là comme ailleurs, mais elles n’ont ni la même audace ni la popularité. Cette vogue du mauvais vient de causes diverses : d’une outrecuidance d’autant plus grande que l’ignorance en est l’élément ; d’un sensualisme plein d’appétits qui se projette au dehors par toutes les voies, même par la voie littéraire ; et enfin d’études mal faites ou incomplètes qui, aidées de la vanité ou de l’ambition, se croient suffisantes pour permettre au premier venu de traiter en prose les plus hautes questions, ou pour chanter en vers les sentiments les plus profonds. Le public qui lit ou écoute, et qui n’écrit pas, élevé dans la même atmosphère et nourri aux mêmes sources, deviendrait involontairement le complice de cette décadence, si le sens