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Page:Le Présent - Tome deuxième, 1857.djvu/454

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LE PRÉSENT.

chargea Bussy, nommé récemment brigadier général, de faire entrer Baçalet-Cingh dans la nababie d’Arkate. Mais les Anglais en commandaient toutes les approches. Il fallait s’ouvrit un passage de vive force ou renoncer au but de l’expédition : or, l’insuffisance du détachement, les chemins rendus impraticables par le débordement des rivières, le manque de vivres et d’argent, tout nous arrêta.

Le 17 octobre 1759, les troupes campées dans la plaine de Vandavaky se révoltèrent. L’armée battit la générale, se saisit de l’artillerie, abandonna ses drapeaux et ses officiers, et se retira à deux lieues de ses quartiers. Elle donna un délai de quatre jours au général en chef pour payer intégralement l’arriéré de la solde, menaçant, ce temps écoulé, de se joindre aux Anglais. Cet événement inouï dans l’histoire militaire moderne acheva d’éclairer la colonie sur les destinées qui lui étaient réservées. Depuis dix-huit mois, la caisse de l’armée avait reçu sept millions de livres ; on avait fait quinze millions de pillage dans la Ville-Noire ; trois millions de billets avaient été créés à Pondichéry pour les dépenses exclusives de la guerre ; enfin on avait touché six millions environ sur les revenus de la nababie d’Arkate ; et cependant il était dû une année de solde aux troupes, qui manquaient de tout. Lally paya six mois d’arriéré et accorda, sur la demande générale, une amnistie sans restriction. L’armée rentra aussitôt dans son premier campement ; mais cette révolte était à peine apaisée, que trois mille Anglais et six mille cipayes entrèrent dans la plaine de Vandavaky.

Peu de jours avant, Bussy s’était replié sur Arkate, dont il avait fait lever le siége, et il se préparait à forcer les passages vers le nord, tandis que Baçalet-Cingh venait à sa rencontre, lorsqu’il reçut l’ordre de rallier le camp et de détacher douze cents hommes de la garnison d’Arkate pour occuper Ceringham, auprès de Triçnapâli. Cette dispersion inopportune de nos forces eut pour premier résultat de livrer à l’ennemi la seule place en état d’être défendue qui nous restât dans la nababie. D’un autre côté, l’armée française, divisée en quatre corps répandus sur quinze lieues de terrain, ne pouvant se concentrer à temps devant Vandavaky, accepta la bataille dans les pires conditions. Bussy, cette fois encore, destitué de tout commandement, ayant eu son cheval blessé mortellement sous lui au milieu de l’action, tomba au pouvoir des Anglais, et Lally, abandonnant toute son artillerie, se retira dans Pondichéry. « — Le gouverneur, le peuple, l’enfer, m’ont