LE ROSSIGNOL ET LA BERGÈRE
Victimes que la gloire
Doit coucher au cercueil,
Prolétaires en deuil,
Méditez cette histoire.
I
Au sein du vert feuillage,
Arrêté dans son vol,
Le tendre rossignol
Modulait son ramage.
Au bord d’une fontaine,
Sous les bosquets en fleurs,
Lise versait des pleurs :
Profonde était sa peine.
« Ah ! faut-il que la guerre,
Ce fléau d’ici-bas,
Vint jadis de mes bras
Arracher mon Valère !
Près de cette onde pure,
Au bon temps, chaque jour,
Nous nous parlions d’amour,
Sous l’œil de la Nature.
Combien sous la feuillée
Étaient doux nos transports !
Que de fois sur ces bords
Je m’endormis charmée ! »
L’oiseau dans la charmille,
Seul par son chant divin
Répondait au chagrin
De la sensible fille.
II
Laboureur, bergerette
Croyaient en l’avenir :
Valère dut partir
Au son de la trompette,
Voulant grandir leur taille,
Les empereurs bandits
Souvent jouent leur pays
Au jeu de la mitraille.