Page:Le Salmigondis tome 1 1835.djvu/389

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faisait les délices de la communauté, quand un jour elle disparut avec sa nourrice indienne, qui avait toujours montré une aversion décidée pour les habitudes de la civilisation. Deux années s’écoulèrent, au bout desquelles, soit par caprice, soit par quelque motif que l’on ne connut jamais, cette femme remit l’enfant à la porte du couvent, sans se montrer elle-même, sans doute pour éviter de répondre aux questions qu’on lui aurait adressées. Aimée de L… (c’était le nom de la jeune orpheline), Aimée n’avait oublié, ni son premier asile, ni celles qui avaient protégé son enfance, et parut les revoir avec plaisir ; mais la contrainte comparative dans laquelle il fallait qu’elle vécût, la fatiguait évidemment, et l’on voyait qu’elle s’était fortement attachée à la vie errante et libre qu’elle avait menée avec sa nourrice. Toutefois, elle demeura avec les sœurs jusqu’à l’âge de douze ans, et s’enfuit alors une seconde fois. Dix mois après, les religieuses la trouvèrent un matin dans leur chapelle, occupée à parer l’autel de fleurs. À force de prières et de caresses, elles l’engagèrent à rentrer dans la maison, et ce fut dans le cours de l’année suivante, qu’Eugène de Bougainville la vit, l’aima et se fit