Page:Le Sylphe - Poésies des poètes du Dauphiné, tome 1, 1887.djvu/136

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LE SYLPHE RÊVERIE Discrètement, le fleuve minuscule Coule en longeant le vieux sentier pierreux. Tout à la fois, il avance et recule Sous l'action d'un zéphyr langoureux. C'est au milieu d'un bouquet d'aubépines Qu'il a choisi son lit, loin des torrents ; Un saule antique aux robustes racines Vient diviser ses limpides courants, Au fond desquels perce un rayon timide Qui fait jaillir son lumineux reflet Sur le parcours de ce ruisseau d'Armide, Et s'éparpille ainsi qu'un feu follet. De la nature une ardeur infinie- Répand ses feux sur les êtres vivants, Et fait rythmer la douce symphonie Du renouveau que chantent les amants. Dans les buissons, sous les épais ombrages, On chante, on aime au fond des nids mousseux. Merles, pinsons, de leurs tendres ramages, Font résonner les bois silencieux. Nul être humain, dans ce coin solitaire, N'ose troubler l'œuvre du Créateur, Ni pénétrer le sublime mystère Où l'on devine un pouvoir protecteur. Mai 1887. Alfred de GRUCHY.