Page:Le Sylphe - Poésies des poètes du Dauphiné, tome 1, 1887.djvu/224

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26 LE SYLPHK penchent déjà vers la tombe. — Celles du boulevard regardent avec envie les grandes, qui sont arrivées, et dont parlent les journaux qui coûtent cher; et les pauvresses contemplent d'en bas celles qui se promènent dans l'éternel éblouissement des fêtes, des bals, des chasses, des courses, et dont la vie n'est qu'un sourire perpétuel sur des lèvres de sang... et qui pleurent la nuit. Mais voilà les premières atteintes de l'âge : une ride invisible, un cheveu blanc bien vite arraché... Horreur! — Qu'a donc fait la Ville monstrueuse des vierges folles de jadis?. . . — Pauvres, pauvres filles de Paris ! Paris-Montrouge, février 1887. Léo NORE. FRAYEURS — A mon Frère. Te souviens-tu, ami, de ces jours déjà éloignés, où Réséda, alors petite fille, écoutait avec de grands yeux etonnés les contes effrayants que ton imagination feconde se plaisait à peupler de personnages fantastiques, dans le seul but de la retenir attentive sur tes genoux et de jouir de la frayeur que tes histoires terri bles lui causaient? Te souviens-tu que tout émue encore des récits de la veille, je n'osais sortir qu'avec toi? Tu te rappelles, sans doute, avec quel frisson je me serrais contre toi lorsqu'il faisait nuit, et combien j'étais heureuse lorsque tu me prenais dans tes bras au sortir de l'école? Je suis certaine que tu n'as rien oublié, que ce souvenir te fait sourire et que tu serais prêt à recommencer si Réséda était restée la fillette d'autrefois. Tout cela me revient à la mémoire, terreurs, frissons d'épou vante, rêves abominables, où les gendarmes, les pauvres et les ramoneurs ne manquaient pas de m'emporter... Quand parfois nous étions brouillés, ce qui arrivait quelque fois, je prenais de grands airs sérieux, ma poupée sur les genoux; je feignais de ne plus penser à toi, de ne plus te voir, mais cela ne durait pas longtemps, car il suffisait d'un sourire ou la pro messe d'une autre histoire pour signer le traité de paix et... nous étions bons amis comme auparavant. Maintenant, tout est changé ; Réséda a grandi, les frayeurs d'autrefois ont disparu. Elle n'a plus peur, et cependant quand