Page:Le Testament de Jean Meslier - Tome 3, 1864.pdf/147

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et que le logement du Maître soit le principal. On y voit des cuisines, des offices, des écuries, des remises de carosses. Les chambres sont garnies de lits pour se coucher, de chaises pour s’asseoir, de tables pour écrire et pour manger. Il faut, diroit-on à ce Philosophe, que cet ouvrage ait été conduit par quelque habile architecte ; car tout y est agréable, riant, proportioné, commode. Il faut même qu’il y ait eu, sous lui, d’excellens ouvriers. Nullement, repondroit ce Philosophe, vous êtes ingénieux à vous tromper vous-mêmes. Il est vrai que cette maison est riante, agréable, proportionée, commode mais elle s’est faite d’elle-même avec toutes ses proportions. Le hazard en a assemblé les pierres avec ce bel ordre, il a élevé les murs, assemblé et posé la charpente, percé les fenêtres, placé l’escalier. Gardez-vous bien de croire qu’aucune main d’homme y ait eu aucune part. Les hommes ont seulement profité de cet ouvrage, quand ils l’ont trouvé fait, parcequ’ils y remarquent des choses qu’ils savent tourner à leur commodité ; mais tout ce qu’ils attribuent au dessein d’un architecte imaginaire, n’est que, l’effèt de leurs inventions après coup. Cette maison, si réguliére et si bien entendue, ne s’est faite que comme une caverne, et les hommes, la trouvant faite, s’en servent, comme ils se serviroient pendant un orage d’un antre, qu’ils trouveroient sous un rocher, au milieu d’un désert. Que penseroit-on, dit Mr. de Cambrai, de ce bisare Philosophe, s’il s’obstinoit à soutenir sérieusement, que cette maison ne montre aucun art ? Quand on lit, dit-il, la fable d’Amphion, qui par un miracle de l’harmonie faisoit élever avec ordre et simétrie