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LE 14 JUILLET

HULIN.

Tu es un optimiste.

L’HOMME.

C’est ma nature.

HULIN.

Ça ne paraît pourtant pas t’avoir très bien réussi.

L’HOMME, de bonne humeur.

C’est ma foi vrai. La chance et moi, nous ne sommes pas cousins. Depuis que je me connais, je ne me rappelle pas avoir souhaité une seule chose qui soit jamais arrivée. — Riant. Bon sang ! J’en ai-t-y eu du guignon dans ma vie ! Ah ! on n’a pas toujours du plaisir en ce monde ; la vie est mélangée, toutes heures ne sont pas bonnes. — Ça ne fait rien. J’espère toujours. On se trompe quelquefois. Mais cette fois-ci, Hulin, je sens que c’est la bonne. Le vent tourne. La fortune est avec nous.

HULIN, goguenard.

La fortune ? Tu feras bien de lui demander d’abord qu’elle te chausse un peu mieux.

L’HOMME, regardant ses pieds nus.

J’aime mieux être dans ces souliers que dans ceux de Capet. J’irai bien sur ces pieds-là jusqu’à Vienne ou Berlin, s’il le faut, pour faire la leçon aux rois.

HULIN.

Tu n’as pas assez de besogne ici ?

L’HOMME.

Cela ne durera pas toujours. Quand nous en aurons fini, quand on aura fait la toilette de Paris et de la France, pourquoi n’irions-nous pas ensemble, — hé ! Hulin ! — bras dessus bras dessous, tous, soldats, bourgeois, et canaille, écheniller l’Europe ? On n’est pas égoïste. Il n’y a pas de plaisir à garder son plaisir pour soi. Moi, toutes fois que je sais quelque chose de nouveau, il faut que j’en fasse part aux autres. Depuis que ces choses bourdonnent en moi :