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VUE GÉNÉRALE DE SAINT-MALO.

d’organes locomoteurs : c’est un être purement passif auquel il est tout à fait impossible de prendre ses jambes à son cou. Les fonctions de la nutrition sont assurées par la bouche qui amène les aliments à l’entrée d’un réservoir stomacal absorbant placé dans l’épaisseur du foie. De celui-ci part un intestin grêle qui se contourne plusieurs fois, se dirige vers le muscle adducteur, puis se termine, vers le milieu du dos, par un orifice flottant. La respiration se fait par quatre feuillets inégaux en longueur qui sont les ouïes. La circulation est assurée par le cœur qui donne naissance à un tronc aortique principal dont les trois branches partent de la pointe. Aujourd’hui on affirme que l’huître est hermaphrodite et vivipare. Si l’on examine au microscope le frai qu’elle jette et qui ressemble assez à une goutte d’axonge fondue, on y distingue une infinité de petits mollusques tout formés qui s’accrochent aux pierres, aux rochers, et parfois se réunissent pour former les amas des bancs d’huîtres.

Voilà l’individu. Quelles sont ses mœurs ? L’huître serait plutôt casanière et ennemie des bousculades. Elle vit de préférence dans les eaux peu courantes et le long des côtes. Si aucune circonstance ne vient la déranger, elle demeure volontiers toute sa vie à la même place. Rien d’étonnant si elle prospère dans les parcs où l’homme lui offre un abri avant de la sacrifier à sa gourmandise et à sa nutrition. Elle se nourrit d’animalcules et de substances végétales qu’elle absorbe avec l’eau de la mer. Le crabe est, après l’homme, son plus cruel ennemi : il s’introduit dans la coquille et dévore son contenu.

De Cancale, allons à Paramé. Il serait dommage de ne pas voir Paramé, pour s’enlever à jamais la pensée d’y aller faire un séjour, — je parle pour moi, bien entendu. J’y ai des amis qui s’y plaisent. Ils ont sans doute raison : ils ont découvert au pays, par de longs séjours, un charme que j’y cherche en vain, en dehors, bien entendu, du spectacle du ciel et de l’eau. J’ai vu Paramé en hiver, mais j’ai deviné son été. Pendant la « saison », il doit être difficile de passer sur la plage, occupée par les chaises et les guérites, sur le quai encombré par le personnel du Boulevard en représentation. En hiver, tout est fermé, le bourg est désert ; les baraques des coiffeurs et des petits marchands font songer à un campement déserté. Il y a dans les rues l’odeur et les échos des villes mortes. C’est en hiver qu’il faut voir ces stations si vantées pour se faire une idée de la laideur des choses que construisent sans fin les architectes chargés de décorer les grèves et de loger les villégiatures. Vraiment, ceux qui ont passé par ici s’y entendent. C’est extraordinaire. De loin, quand le soleil fait briller les plâtres, les zincs et les ardoises des maisons neuves, on se demande déjà quelle ville étrange impose cet alignement à ce beau paysage d’eau, de ciel et de sable. On approche, les détails se précisent ; on marche pendant un kilomètre devant la plus stupéfiante réunion de cafés, de pavillons, de caravansérails. Les plus incommodes dispositions, les ornementations les plus baroques ont été choisies. Toutes