2 LE TOUR DU MONDE.
L’un d’eux, un Français qu’y retenaient ses affaires, à été le témoin et a failli être la victime de la catastrophe. Au lendemain des jours de malheur, il à envoyé à sa sœur une lettre pleine d’émotion et d’humour qui est en même temps un récit fidèle. La voici :
Valparaiso, 4 septembre 1906.
Ma PETITE MaARkION,
Ayant maintenant un peu plus de temps et de facilité pour écrire, je vais essayer de te donner quelques détails sur la catastrophe du 16 août dernier, mais je dois te prévenir qu’il faudrait une autre plume que la mienne pour rendre toutes les horreurs qui se sont passées ici.
Je devais partir pour Santiago le 45 août, maïs ayant encore beaucoup de travail à faire, j’avais reculé mon départ de deux jours et l’avais fixé au 17 à 8 heures du matin. Le 16, vers 7 h. 50 du soir, nous dinions une douzaine de Français ensemble dans notre pension habituelle, lorsque brusquement survient une secousse de tremblement de terre : Étant habitués à ces choses en ces pays où les tremblements de terre sont fréquents et généralement bénins, nous restons la plupart à table ; mais bientôt Îles secousses deviennent tellement fortes que les verres, les assiettes, les bouteilles tombent sur le sol : des platras, des briques se détachent de la muraille et pleuvent sur nous en même temps que des craquements épouvantables se font entendre. Comprenant que cette fois cela est sérieux, nous nous précipitons affolés vers l’escalier ; et cette descente d’escalier est une chose que je n’oublierai jamais de ma vice. Nous sommes là au milieu d’une poussière qui nous aveugle, d’une pluie de briques qui tombent autour de nous, sentant les. marches qui se dérobent sous nos pieds. Comment ai-je descendu ? je n’en säis rien. Je me rappelle seulement avoir sauté 5 ou 6 marches à la fois, jeté par les secousses d’un côté du mur à l’autre. Nous arrivons enfin à la porte, mais au moment de sortir, les premiers se rejettent en arrière pendant que ceux qui viennent derrière poussent et crient : « sortez ! sortez ! » En même temps nous entendons un bruit terrible ; c’est une partie du mur de façade de la maison qui vient de s’abattre sur le sol à 1 mètre peut-être de la porte par où nous sortions. Nous nous précipitons enfin sur une petite place qui se trouve eh face et nous restons là, grelottants de peur, nu-tête, notre serviette encore au cou et sous une pluie assez froide.
Tout. se passe dans une obscurité complète, l’électricité s’étant éteinte subitement pendant qu’au-dessus de nous se déchaîne une véritable
tempête d’éclairs.
Autour de nous ce sont des cris inarticulés de gens qui se sauvent sans but, affolés, quelques-uns en chemise ; qui s’appellent les uns les autres en pleurant, pendant que d’autres se jettent à terre, dans la boue, en implorant à grands cris la
miséricorde divine. Au-dessus de ce bruit. s’entendent les hurlements de blessés que des amis entraînent : l’un a la jambe cassée, l’autre le bras, et ils crient autant de frayeur que de douleur.
A peine sommes-nous depuis quelques instants dans la rue que survient la seconde secousse, au moins aussi forte, si ce n’est plus que la première. C’est alors une panique indescriptible. Nous formons un groupe au milieu de la place, mesurant de l’œil la distance qui nous sépare des maisons qui tombent tout autour de nous et nous sommes obligés de nous tenir par le bras lés uns les autres
LA MAISON GUÉRIN FRÈRES EST LA SEULÉ DÉ TOUT UN PATÉ DE MAISONS pour ne pas être renversés. Pendant cette secousse QUI AIT ÉTÉ RESPECTÉE PAR L’’INCENDIE {page 4). une partie de la façade de la maison Guérin ! s’écroule. Tous nous sommes persuadés que nous
sommes perdus, car l’endroit où nous nous trouvons est un terrain qui a été pris, dans le temps, à la mer, et la grande peur que l’on se communique à voix basse est que la mer né reprenne ce qu’on lui a pris.
4, L’auteur de cette lettre y était employé.