Page:Le Tour du monde, nouvelle série - 19.djvu/82

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raissent des crevasses, très étroites, elles ne nous opposent aucun obstacle, mais c’est un avertissement. Plus loin, une nouvelle chaîne de monticules. « Si, au lieu de les contourner, nous les franchissions, nous gagnerions du temps, propose Hansen. — Oui, mais l’entreprise est hasardeuse. — Laisse-nous essayer, répond notre camarade toujours prêt à aller de l’avant ; si cela ne marche pas de ce côté, eh bien ! cela ne marchera pas ; nous ferons alors le tour. » J’avoue ma faiblesse et cède aux instances d’Hansen. Au début, tout semble aller à souhait. Plusieurs mamelons sont gravis, puis soudain les trois chiens de tête de Hansen disparaissent dans une crevasse. Notre camarade repêche ses animaux et le reste de la caravane passe ensuite sans encombre. Quelques instants après, nouvelle chute de la tête de colonne ! Cela se gâte ! Nous nous sommes fourvoyés dans un nouveau labyrinthe non moins dangereux que le premier. Immédiatement, j’arrête le mouvement ; j’en ai assez de cet exercice et je donne l’ordre de rebrousser chemin. « Attendez, encore quelques mètres, nous sommes de l’autre côté du mauvais pas, » reprend Hansen, qui ne veut pas démordre de son idée. Soit ! en attendant, revenons en arrière. C’était un monticule de pression, pareil à ceux qui se forment au milieu de la glace flottante. Il semblait composé de quatre énormes glaçons dressés debout les uns contre les autres ; entre eux, il y avait certainement un énorme gouffre. Hansen, qui a toujours éprouvé un plaisir particulier à se trouver sur ce terrain, probablement pour étudier son degré de solidité, fait demi-tour en maugréant et en lançant un regard chargé de colère contre ces glaces qui ne se sont pas prêtées à ses expériences.

UNE PARTIE DU PLATEAU DE GLACE.

Actuellement, vue étendue sur la Barrière. Comme nous l’avons déjà remarqué précédemment en plusieurs occasions, cette dislocation du glacier se trouve dans une dépression. Après avoir contourné cet affaissement, nous parvenons sur le renflement qui le domine. À ce moment se découvre, dans l’est, un jalon surmonté d’un pavillon. Notre route était donc trop à l’ouest. Encore quelques crevasses, puis un énorme trou, et nous touchons enfin au sol solide.

Dans la soirée, nous passons près de deux huttes de neige élevées lors de notre précédente expédition. Elles ont été à moitié remplies par les tempêtes. Aussi dressons-nous la tente à côté. Le temps est d’ailleurs doux et très agréable ; 42 kilomètres seulement nous séparent du dépôt. Nous devons nous estimer heureux qu’aucun de ces nombreux incidents n’ait eu de conséquences graves. À part les crevasses, la piste avait été bonne et la marche facile.