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est un peu encaissée dans le relèvement de ses bords, et est à peu près circulaire, avec un diamètre d’une centaine de pas ; les talus, ayant une pente de un sur un, sont longs de cinquante pas. Ces monceaux de terre sont construits par assises régulières ; leur intérieur contient des débris de poteries et des médailles.

Je rencontrai, aux environs de la ville, quelques Illyates ; ils campent sur les pâturages de leurs bestiaux, qu’ils choisissent habituellement à proximité de petits ruisseaux sortant du sable pour y rentrer à quelques lieues plus loin.

Le terrain de Véramine est couvert de ruines en terre qui semblent indiquer l’emplacement d’une grande ville. À une demi-lieue vers les montagnes, se trouve un très-grand rectangle fermé par des murailles en terre très-épaisses, dont les grands côtes sont flanqués de trente-cinq tours et les petits côtés de trente-neuf. Les bases de ces tours sont marquées par les éboulements en éventails qui les couvrent ; les habitants désignent cette ruine par le nom ordinaire de « château des Guèbres. » C’est un poste qui correspondait aussi, sans doute, par des feux, avec les autres monticules de la campagne, et avait assez d’importance pour qu’il fût possible d’y abriter une réserve.

Au milieu de Véramine, existe encore un autre château en terre, dont les murs très-élevés sont entourés d’un fossé ; non loin est une tour ronde, cannelée, en briques, et recouverte d’un chapiteau en éteignoir, dont un gros nid de cigogne formait le bouton supérieur ; à l’endroit le plus élevé, parmi les ruines gisantes de grands édifices, on remarque celles d’une mosquée qui a dû être un chef-d’œuvre de travail, si l’on en juge par ses briques émaillées, ses genres divers de sculptures se superposant, ses écritures monumentales en cufique d’un grand relief, ses dessins en briques et ses colonnes torses. Après avoir battu le terrain pendant deux heures, nous rentrâmes au logis hospitalier du lieutenant de la province. Il nous promit des musiciens et des danseurs, à l’occasion d’une noce qui devait se célébrer le lendemain et à laquelle il nous fit inviter par le futur avec beaucoup de cérémonie.

Campement d’Illyates, dans la plaine de Véramine. — Dessin de M. le commandant Duhousset.

Cette circonstance valait bien la peine de prolonger un peu notre séjour, qui me fournit l’occasion de dire quelques mots sur les mariages en Perse.

Les premières conditions se règlent par les parents ; l’homme constitue la dot, et cette dot est acquise intégralement à la femme. Le mollah (prêtre), devant lequel se rédige l’acte de donation, demande à la femme si elle consent à prendre pour époux tel homme, avec telle somme d’argent. Si elle accepte, le futur lui envoie immédiatement, sur un plateau, une bague, un miroir et un châle, accompagnés de pains de sucre.

Aussitôt que le mot agde (mariage) a été prononcé, une partie de la somme promise est envoyée pour le trousseau de la mariée, qui est censée n’avoir pas encore été aperçue, quoique tout ait été arrangé pour en procurer la vue au futur : soit en le cachant derrière un rideau, soit en ayant l’air d’ignorer les rencontres dont il a profité pour faire sa cour pendant les deux ou trois mois qui ont précédé la conclusion du mariage. Cette époque arrivée, on fait des invitations pour les fêtes, qui durent ordinairement trois jours et même une semaine chez les gens riches.

Le premier jour, on convoque des musiciens, des danseurs, ainsi que les parents et amis : les femmes chez la fiancée, les hommes chez le futur ; il y a un échange de compliments.

Le second jour, au coucher du soleil, les musiciens vont en grande pompe, de la part de la fiancée, porter a l’homme le henné pour se teindre les mains et les pieds en jaune foncé.

Le troisième jour, le fiancé va au bain ; et deux de ses amis se constituent aussitôt ses gardiens, en prenant le nom de main droite et de main gauche. Celui qui fait le plus joli cadeau de sucrerie a la droite et commande toutes les excentricités qu’il lui plaît d’inventer pour égayer l’assemblée.

Au sortir du bain, on revêt le fiancé d’un habillement envoyé par la jeune fille, et on le ramène chez lui, musique en tête ; à différentes reprises, ses acolytes lui lan-