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Dîner chez un chef cafre.


CHASSES EN AFRIQUE.

DE PORT-NATAL AUX CHUTES DU ZAMBÈSE,


PAR WILLIAM-CHARLES BALDWIN,
Membre de la Société de géographie de Londres.
1852-1860. — TRADUCTION INÉDITE PAR MADAME H. LOREAU[1].




Dîner chez l’un des chefs des bords du lac. — Marche au clair de lune. — Incendie de la forêt. — À propos de lions.

15 juin. — J’arrive des bords du lac ; il m’a fallu, à cheval, à peu près deux heures et demie pour atteindre le point le plus rapproché du kraal. Léchulatébé, le chef de l’endroit, m’accompagnait et m’a donné avec la plus grande obligeance tous les renseignements qu’il a pu me fournir. Je ne pense pas que ce soit un méchant homme, mais c’est un terrible mendiant ; tout lui fait envie. Il ne paraît pas croire qu’on puisse lui refuser quoi que ce soit ; ne vous donne rien en retour, achète aux conditions qui lui plaisent, et demande un prix extravagant de ce qui lui appartient. Il est jeune, actif, chasse l’éléphant, est bon tireur et possède des fusils Wilkinson, de Nock et de Manton. Comme nous revenions du lac, il m’a invité à dîner. Le repas eut lieu en plein air et, fut servi par les plus jolies filles du kraal, qui, agenouillées devant nous, tenaient les assiettes dans lesquelles nous mangions. Elles n’avaient pour tout vêtement qu’une écharpe de peau souple, drapée au-dessus de la hanche. Des grains de verre de toute espèce, des bracelets d’ivoire, de cuivre, de fil de laiton leur décoraient la poitrine, le cou, les jambes et la taille.

Je ne crois pas qu’on puisse trouver de jeunes filles mieux faites que les Cafrines lorsqu’elles sont bien nourries. Elles ont de petits pieds, de petites mains, les bras ronds et bien modelés, les poignets et les chevilles d’une extrême délicatesse ; leurs yeux et leurs dents ne sauraient être surpassés, et leur taille est flexible et mince comme une baguette de saule.

On dit que le bonheur parfait n’existe pas sur terre ; mais de tous les mortels celui qui en approche le plus est certainement un chef de peuplade cafre ; l’opposition lui est inconnue : il a le droit de vie et de mort sur tout ce qui l’entoure, peut avoir autant de femmes qu’il en veut, et les répudier quand bon lui semble. On veille sur lui comme sur un enfant, tous ses vœux, tous ses caprices sont satisfaits ; en lui apporte de tous côtés des

  1. Suite et fin. — Voy. pages 369 et 385.