velle du débarquement des volontaires à Capo dell’Armi, à Villa-San-Giovanni, à Cannitello, à Altafiumara, à Torre-Cavallo. Devant un tel débordement, que faire que devenir ? où aller ? où ne pas aller ? Le gouvernement napolitain perdit la tête, et, dès ce jour surtout, sa destinée fut écrite.
Notre traversée au sortir de Messine dans le canal étroit qui sépare la Sicile des Calabres s’annonce comme une promenade des plus agréables. Ce serait une véritable partie de plaisir que d’affréter un navire pour une telle excursion, et si le détroit de Messine était aux portes de Paris, quelque industriel en ferait bientôt l’entreprise. Appuyés sur la rampe de la dunette, nous dominons le paysage et nous voyons passer devant nous les champs plantés d’oliviers, les vignes en échelons sur les flancs de la chaîne des Apennins ; les maisons par groupes rangées sur le bord des routes qu’on voit monter entre deux parapets et se perdre dans les plis d’un vallon.
La physionomie de cette partie de la côte est agreste et gaie. Le rivage de Sicile, le long du détroit, présente une physionomie bien différente. Il est très-sauvage. L’Etna le domine et lui donne son caractère. Les anciens en avaient été frappés. Ils avaient placé les antres des Cyclopes au pied de cette chaîne, couronnée d’un dôme de neige et d’un panache de feu. Le soleil, qui descend à l’occident, s’est caché derrière le sommet de l’Etna. La rive sicilienne du détroit est plongée dans une obscurité relative. Les nuages projettent de grandes ombres mouvantes. Il n’est pas nécessaire de faire des efforts d’imagination pour se représenter, sur ces bords, le gigantesque Polyphème, lavant la plaie toujours sanglante de son œil crevé par Ulysse et lançant, avec des hurlements de douleur, des rochers volcaniques contre la flotte d’Énée qui s’éloigne à force de rames.
Tant qu’avait duré notre navigation dans le détroit, la mer avait été calme, le ciel bleu et la température douce. Nous avions eu probablement la bonne fortune d’y passer au moment où Neptune, sur son char azuré, glissait à la surface des flots en les aplanissant et visitait cette partie de son empire entouré du cortége des baleines, des tritons et des nymphes.
Mais le bénéfice de cette rencontre devait bientôt être expié sans doute sous l’influence de quelque dieu jaloux. Vers quatre heures, et lorsqu’à peine nous avions dépassé de quelques milles les derniers contre-forts de la chaîne italienne, le vent s’éleva tout à coup, les nuages s’amoncelèrent, la mer se couvrit d’écume : indice certain de la tempête qui sévissait devant nous.
Pendant deux jours et trois nuits, le Danube soutint les assauts de la mer sans se laisser entamer, quoique ses membrures fussent si violemment secouées que vingt fois on pût croire qu’elles allaient se disjoindre. La troisième journée était déjà fort avancée quand le commandant reconnut que nous avions dérivé sur les côtes de Grèce. Nous n’étions qu’à une faible distance du golfe de Coron. Or, l’ouragan n’avait