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M. Credner, M. Tuch et M. Renan, supposent que c’étaient des païens, des Sabéens (qui adoraient les astres), se fondant sur ce que presque tous les noms propres sont païens ; quelques-uns même, dit M. Tuch, se donnent le titre de prêtres de divinités païennes, et l’on ajoute qu’il y avait des sanctuaires du culte sabéen au Sinaï, au Serbal et en d’autres endroits où conduit le Wadi-Mokatteb. D’autres, notamment Beer et M. François Lenormant, sont d’avis que ces pèlerins étaient des chrétiens des trois ou quatre premiers siècles, et invoquent, outre les symboles évidemment chrétiens, divers arguments d’histoire et de linguistique que nous n’avons pas à analyser ici. Il suffit que nous ayons donné à réfléchir sur ces questions aux voyageurs et aux auteurs qui persistent encore à dire aujourd’hui même que personne ne peut déchiffrer les inscriptions sinaïtiques.

Inscriptions sinaïtiques figurées. — D’après le Voyage à l’Arabie Pétrée de M. Léon de Laborde.


Wadi-Feiran. — Wadi des Palmiers. — Misère des Bédouins. Le mont Serbal. — Le Nabs-el-Hawa.

Vers les cinq heures du 24 février, nous arrivons à l’entrée de Wadi-Feiran. Nous sommes toujours sous le charme de la beauté des rochers que nous traversons. La forme n’y cède jamais en rien à la couleur qui est éblouissante. Ici, il y a un peu plus de végétation que dans les autres wadis, où il ne pousse que des genêts dont nos chameaux cherchent, en passant, à happer quelques brindilles. Ces genêts, il faut le dire, ont une odeur très-aromatique et sont d’une légèreté de ton ravissante. Ils couvrent quelquefois toute la vallée : on dirait qu’elle est tapissée d’une couche de neige verte.

25 février. — Nous quittons notre campement à sept heures. Pour faire une partie du chemin en chassant, nous prenons les devants et, dans ce labyrinthe de wadis, nous nous perdons. Nos Bédouins, ne nous voyant plus, reprennent en arrière la trace de nos souliers ferrés sur le sable et nous découvrent au moment où nous étions en danger de nous égarer complétement. Or, se perdre dans ces solitudes, c’est, à coup sûr, la mort, et quelle mort ! L’une des plus cruelles assurément que l’on puisse imaginer.

À deux heures, nous arrivons au Wadi des Palmiers, qui nous offre l’aspect d’une vraie oasis. Les arbres sont animés par le vol et les chants d’une multitude d’oiseaux, de merles qui chantent et sifflent, de tourterelles, de pigeons sauvages qui roucoulent, et que nous décimons à coups de fusil, avec un certain mélange de plaisir, de pitié et de regret.

Les puits, les ombrages des palmiers et des tarfah (tamarix mannifera) entretiennent une agréable fraîcheur dans cette étroite vallée. Les Bédouins peu nombreux qui l’habitent ont l’aspect le plus misérable et