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ties par la souffrance, n’avaient rien des races que nous avions vues : les malheureux avaient perdu la forme humaine. Juste ciel ! pensais-je, voilà donc les esclaves de la reine ! Ah ! que nous étions loin de la servitude patriarcale que j’avais rencontrée dans les cases malgaches !

Bien des fois j’avais vu des esclaves ; mais jamais, non, jamais, je n’avais assisté au spectacle de tant de douleur, de tant d’abjection et de tant de misère.

Ferdinand, que je rencontrai, m’expliqua que ceux-là étaient des esclaves rebelles et fugitifs, et qu’on leur imposait cette abominable rigueur dans les châtiments.

Quelques-uns de ces malheureux traînaient depuis de longs mois, d’autres depuis plusieurs années cette existence de damné ; nous demandâmes à notre hôte, comme faveur et comme un bon souvenir de notre séjour dans sa maison, la grâce d’un coupable : il s’empressa de nous l’accorder, et le misérable qu’on délivra sur l’heure vint en tremblant nous remercier.

Espions de la reine de Madagascar. — Dessin de E. Riou.

Vers le midi, nous faisions nos adieux à Ferdinand, pour regagner Tamatave.


VI


Couronnement de la reine à Tamatave. — Andrian-Mandrousso. — Les Antaymours. — Les Cymerirs. — Raharla. — Les Ovas. — Code de lois. — Organisation à Tananarive. — Organisation des provinces. — Départ pour Sainte-Marie.

À peine de retour, nous trouvâmes à notre adresse une invitation du commandant de la province, nous engageant à vouloir bien assister à la cérémonie du couronnement de la nouvelle reine ; cérémonie qui devait avoir lieu dans l’intérieur du fort de Tamatave. Nous devions partager cet honneur avec toute la population, car elle était aussi invitée. Nous nous y rendîmes ; le chemin du fort était couvert de piétons de toutes les classes, de tous les rangs et dans tous les costumes, depuis le lamba de rabane et le simbou de coton, jusqu’à l’habit noir ; il n’y a point de tenue officielle. Nous reconnûmes quelques-uns de nos nouveaux amis, et nous vîmes pas-