Page:Le Tour du monde - 10.djvu/318

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de train jusqu’à la montée du plateau, que tout le monde dut faire à cheval, à cause de la difficulté de faire mouvoir les roues dans ces pentes sablonneuses.

« À notre arrivée au sommet, nous avons eu le coup d’œil le plus saisissant et le plus admirable : derrière nous les vallées et les montagnes sourcilleuses plongées graduellement dans l’ombre, tandis que le disque du soleil s’abaissant à ]’horizon rougissait leurs sommets de ses derniers feux ; devant nous, des prairies sans fin, l’immensité couverte d’herbes verdoyantes ! c’était une mer avec des ondulations de graminées semblables à de longues vagues ! c’était la Mongolie enfin, la terre du gazon, comme l’appellent ses libres habitants ! le désert, le désert infini avec toute sa majesté, et qui vous parle d’autant plus de Dieu que rien n’y rappelle les hommes !

Mappemonde chinoise (2e spécimen) (voy. pages 290 et 313).

« Le ciel, au-dessus des prairies, était de cette douce couleur de vert d’algue marine claire et un peu rosée dont se revêt ordinairement le côté de l’horizon opposé au soleil couchant. C’était une transparence et une pureté d’atmosphère que rien ne saurait exprimer ; le haut des herbes seulement était doré par le dernier rayon du soleil qui allait se perdre dans cette immensité.

« Mais nous ne pouvions jouir longtemps de ce magique spectacle : la nuit arrivait rapidement, et nous avions encore deux heures de marche pour arriver à Bourgaltaï, la première station de Mongolie.

« Dans ces plaines sans bornes, la nuit est bien plus profonde que dans les pays accidentés. Aucune élévation, aucun arbre ne pouvant former un point de repère pour le regard ; on n’a devant soi que l’uniformité du sombre.

« Aussi dûmes-nous tous mettre nos chevaux à la file pour suivre pas à pas l’officier mongol chargé de nous accompagner.

« Toutes ces précautions n’ont pas empêché que, quelques instants avant notre arrivée à Bourgaltaï, nous nous sommes aperçus de l’absence de M. Bruce. Il a fallu une demi-heure pour le retrouver à grands renforts de cris poussés par nos Mongols qui galopaient à fond de train dans les steppes. Il s’était écarté de quelques pas