Page:Le Tour du monde - 12.djvu/372

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Le rhythme des malagueñas a quelque chose d’étrange, de barbare même si l’on veut, mais à coup sûr il n’a rien de vulgaire ni de banal ; on peut en dire autant des cañas, des carceleras, des playeras, des rondeñas et autres chants populaires d’Andalousie sur lesquels nous aurons l’occasion de revenir. De même que tous ces airs, les malagueñas ont, sans nul doute, une origine moresque, et ce sont, sans altération aucune, les mêmes mélodies que chantaient, en s’accompagnant du laud, les sujets d’Ibn-al-Kamar et de Boabdil ; probablement aussi les paroles ne sont que la traduction de quelques anciens romances moriscos.

Voici une malagueña, la plus populaire, la plus classique, et qui cependant n’a jamais, que nous sachions,


L’escrime à la navaja : Le desjarretazo. — Dessin de Gustave Doré.


été publiée nulle part[1] : « Adieu, Malaga la belle ! s’écrie tristement un Malagueño, adieu, Malaga, pays où je naquis ! Tu fus une mère pour les autres, et une marâtre pour moi ; adieu, Malaga la belle ! »

Les malagueñas se composent ordinairement de couplets de quatre vers chacun ; le premier et le dernier vers se répètent deux fois. Le sujet n’est pas toujours aussi mélancolique, mais il est presque toujours sentimental :

Echame, niña bonita,
Lagrimas en tu pañuelo,
Y las llevaré a Granada,
Que las engarze un platero.

Donne-moi, charmante petite, — Tes larmes dans ton

  1. Nous devons à l’obligeance de Mme Aline Hennon l’accompagnement, pour piano, de cette Malagueña.