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Page:Le Tour du monde - 15.djvu/324

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l’aise, dignes et silencieux, comme il convient à des gentilshommes. Un officier de haut rang, qui a été simple spectateur de leurs exercices, garde dans son costume une tenue exempte de toute recherche de ventilation ; mais il croit pouvoir se dispenser de conserver, au sortir de la séance, ses gants de coton blanc, dont les manches remontent jusqu’au coude, et il en a ganté la poignée de ses deux sabres, sans se douter le moins du monde que cette ridicule combinaison lui donne, à nos yeux, l’apparence d’un mannequin ambulant.


Un maître d’escrime. — Dessin de Émile Bayard d’après une esquisse japonaise.

J’ai assisté plus d’une fois à des assauts d’armes de yakounines. Les champions se saluent avant de s’attaquer. Souvent celui qui est en garde met un genou en terre pour mieux croiser le fer et parer plus solidement les coups de son adversaire. Chaque passe est accompagnée de poses théâtrales et de gestes expressifs ; chaque coup provoque, de part et d’autre, des exclamations passionnées ; puis les juges interviennent et prononcent emphatiquement leur verdict ; enfin une tasse de thé assaisonne l’entracte, et la joute recommence de plus belle.

Il y a même une escrime à l’usage des dames japonaises Leur arme est une lance au fer recourbé, que l’on peut comparer avec celle des faucheurs polonais. Elles la portent la pointe penchée vers le sol, et la manient réglementairement dans une série d’attitudes, de poses et de mouvements cadencés, qui fourniraient de charmants motifs de ballet. Il ne me fut pas permis de jouir longtemps de ce gracieux spectacle, que j’aperçus en passant devant une cour entr’ouverte. Les yakounines en fermèrent la porte, en m’assurant que les