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Page:Le Tour du monde - 17.djvu/220

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ville ; c’était ce que l’on appelait la porte Blanche, la couleur des briques étant plus chaude et plus gaie que celle du sombre grès de la porte Noire. Le gouvernement prussien a fait déblayer ces ruines, et les fouilles se prolongent encore sur un terrain voisin qu’il a récemment acquis. Jusqu’à ce que l’on ait dégagé tout le périmètre de ce monument et que l’on en ait dressé un plan exact, l’opinion de Wyttenbach, qui a le premier parlé de thermes, me paraît la plus vraisemblable. L’étendue considérable que paraît avoir occupée cet édifice est déjà une première présomption ; on sait quel espace couvraient à Rome les thermes de Caracalla ou ceux de Dioclétien. L’aspect général rappelle aussi celui de ces ruines célèbres : ce sont de grandes salles avec des absides demi-circulaires, ce sont des souterrains soigneusement voûtés, où conduisent de nombreux escaliers. Il semble que l’on distingue aussi l’emplacement de larges bassins, de piscines placées au centre des plus vastes pièces. Il y a certainement, près de l’entrée actuelle et de la maison du gardien, les restes d’un énorme fourneau.

Un édifice qui ne se prête point aux mêmes incertitudes, c’est l’ancien amphithéâtre, situé à cinq cents pas des thermes, à l’entrée de l’Olewigthal. Comme celui de Cyzique, en Asie Mineure, cet édifice a été en grande partie taillé dans le tuf d’une colline. Les gradins ont complétement disparu : pendant le moyen âge, l’amphithéâtre servait de carrière. Il ne subsiste aujourd’hui que l’arène avec son dallage et la rigole qui règne tout à l’entour, le podium, fait de pierre de taille
Mustert. — Dessin de Stroobant.
de petite dimension, soigneusement appareillée avec du ciment, l’entrée de quelques caveaux s’ouvrant dans le mur du podium, enfin les deux grandes allées qui avaient été creusées dans la colline pour que, du nord et du sud, chars, chevaux, bêtes féroces et gens pussent entrer de plain-pied dans l’arène.

C’est à cet amphithéâtre que se rattachent les derniers souvenirs de la Trèves romaine ; dans le cours du cinquième siècle, c’est sur ces gradins, qui pouvaient contenir environ soixante mille personnes, que les habitants de la malheureuse Trèves venaient se presser entre deux catastrophes, pour chercher dans les fiévreuses émotions de ces cruels spectacles quelques heures d’insouciance et d’oubli. C’est cette passion, c’est ce délire qui inspire à Salvien, un prêtre de Cologne qui a étudié et vécu à Trèves, cette éloquente et pathétique apostrophe : « Vous désirez des jeux publics, habitants de Trèves ; après le sang, après les supplices, vous demandez des théâtres, vous réclamez du prince un cirque ; mais pour qui ? pour une ville épuisée et perdue, pour un peuple captif et ravagé, qui a péri ou qui pleure ! »

C’est encore un édifice romain, le palais, dit-on, de l’impératrice Hélène, mère de Constantin, qui forme la partie centrale, le noyau du Dom de Trèves, la plus ancienne cathédrale de l’Allemagne. Il est difficile à première vue de reconnaître la construction primitive sous toutes les additions, sous tous les changements postérieurs. Consacrée à saint Pierre par l’évêque Agritius, vers le commencement du quatrième siècle, elle subit déjà une première restauration au sixième siècle, par les soins d’un archevêque, Nicetius, qui demande