saut la forteresse. Les parents s’en vont alors, avec les prisonniers, à la rencontre du promis, qui se présente avec une suite plus ou moins nombreuse. Lorsque les deux partis réunis sont arrivés en face de la demeure de la fiancée, ils se livrent tous ensemble à exercice de la course qui simule un tournoi. Les cavaliers les mieux montés et qui arrivent les premiers au but reçoivent des mains de la fiancée un voile brodé d’or ou de soie.
« Ces exercices finis, tout le monde se rend à l’église. Le jeune marié et sa fiancée se tiennent debout sur un tapis où l’on a jeté des pièces de monnaie, témoignant par là du peu de cas qu’ils font des richesses pour ne chercher que le bonheur domestique. Lorsque le prêtre dépose sur leur front la couronne nuptiale, un des assistants jette à droite et à gauche des noix et des noisettes, pour montrer que les jeunes mariés renoncent à tout jamais aux amusements de l’enfance et que des objets plus sérieux occuperont désormais leur vie.
« De retour à la maison, un dîner est servi. Les mariés occupent le haut bout de la table ; à droite et à gauche se placent les beaux-pères et les témoins. Alors un des frères, ou en son absence un des plus proches parents du jeune homme, se lève et lui adresse la parole en ces termes :
« Frère, vous voici arrivé à l’âge du mariage et de la joie ; notre père vous accorde une place à sa table et vous marie aujourd’hui en vous unissant à une autre famille. Gardez toujours néanmoins la mémoire de ceux à qui vous devez le jour, et conservez toujours votre amour à vos frères. Continuez à demeurer soumis de cœur aux volontés de vos parents, afin d’obtenir leur bénédiction. Honorez votre père et songez toujours à ce que votre mère a souffert pour vous ; car ce sont eux qui vous ont donné la vie. Puisse leur bénédiction et celle du Seigneur Dieu vous maintenir toujours dans la joie ! »
« Après le repas, quand le jeune homme est sur le point de se retirer avec son épouse, le vatachel, qui porte un bâton orné de fleurs et de rubans et se tient derrière la fiancée, se lève et demande, au nom de celle-ci, pardon à ses parents en ces mots :
« Quand nous nous demandons, honorables parents, quel est le véritable bonheur de la vie, nous trouvons qu’il n’en est pas de plus grand et de plus solide que celui que nous procurent les enfants. En effet, ce bonheur est, ainsi que le disent les philosophes, proprium naturæ, c’est-à-dire un bonheur réel et conforme à la nature ; car ils sont notre sang, ils sont d’autres nous-mêmes. Ce bonheur, la sainte Écriture l’atteste aussi : Votre femme dans l’intérieur de votre maison sera comme une vigne fertile et abondante ; vos enfants, comme de nouveaux plants d’olivier, environneront votre table. Vous voilà donc aujourd’hui, vous, honorable père, ainsi que votre épouse, au comble de la joie. Contemplez tous deux le bonheur pur, réel et sans mélange de votre fille, et jouissez de la joie intarissable des parents ; car voici que, d’abord par votre volonté et ensuite par vos bénédictions, votre bien-aimée fille devient, pour toute sa vie, la compagne de notre frère N… Parvenue à cet âge heureux, votre enfant, en quittant votre maison pour aller dans celle que Dieu lui a choisie, doit, de concert avec son compagnon, vous remercier et implorer vos bénédictions ; car la bénédiction des parents est un rempart inébranlable autour de sa maison. Il est temps que votre fille implore votre pardon pour tout ce qu’elle a manqué de faire, afin d’accomplir vos volontés et les désirs de