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Page:Le Tour du monde - 54.djvu/440

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REVUE GÉOGRAPHIQUE.

chrétiens faits prisonniers par les corsaires sur les côtes barbaresques ? Le récit de l’aventureux voyage de M. Camille Douls semble nous ramencr à ces tempslà. Le voyageur. n’ayant pu pénétrer à l’intérieur du Maroc par le nord, avait réussi à se faire débarquer seul ; avec un mince bagage, au cap Garnet, sur la partic de côle qui s’étend du Sénégal au Maroc. Il se trouvait là au milieu de Maures nomades exlrèmement fanatiques, et c’est par une sorte de miracle qu’il a revu la France : La qualité de musulman qu’il s’attribuait inspirait des doutes sérieux aux indigènes, qui dès la première rencontre manifestèrent l’intention de le massacrer, L’intervention d’un grand personnage le sauva non sans peine, et pour cette fois, mais les mélances ne désarmèrent pas. M. Douls fut conduit auprès du chef des nomades, le chérif Moulainine, qui le déclara bon musulman. Ce haut témoignage, confirmé par un fidèle éprouvé qui reconnut en M. Douls un Ture, mit dès lors le voyageur en sûreté ; il put parcourir ainsi, cn nomade, avec ies Maures, une contrée que Bou el-Moghdad en 1860-1861, le Français Panet vers Ja mème époque, avaient seulement traversée du sud au nord. Il s’est avancé, du côté de l’est, jusqu’à Ja limite d’El-Djouf ou grande dépression saharienne : remontant au nord, 1l a regagné la côte et l’a longéc jusqu’au bassin de fleuve appelé Sàguict El-Hamra, dont il releva une grande partie. Il s’avanee dans l’est jusqu’à l’oasis et à la ville de Fendouf, vues par Le rabbin Mardochée an 1858 et plus récemment par le voya- ‘geur autrichien O. Lenz. À travers le pays des Ketoua ct le Tekna il revient au cap Djoûbi et atteint enfin Maroc par le Sous et l’Atlas. À Maroc recommencent pour lur les dangers qui avaient marqué le début du voyage ; arrêté comme espion. il est mis aux fers ct ne doit qu’à une circonstance fortuite d’être mis en liberté, sur les instances de M. Kerby Green, ministre d’Angleterre au Maroc,

M. Douls a réuni, au cours de ces voyages, un grand nombre d’informations importantes sur la géographie du Sahara occidental, et les géographes attendront avec impatience la publication de son récit.

V

Le révérend George Grenfell et le docteur Mense ont eu le mérile incontestable de déterminer enfin, d’une façon précise, le cours inférieur du Qwango. On se souvient peut-être qu’en 1880 le major von Mechow descendit cette rivière jusqu’aux rapides de Kingoundii, siluëés sous 505’ de latitude méridionale. Le mauvais vouloir des indigènes l’obligea d’interrompre en ce point le laborieux et admirable travail cartographique qu’il avait entrepris. Cinq ans plus tard, M. Massari, lieutenant de vaisseau de la marine italienne, au ser. vice de l’État libre du Congo, reçut la mission de compléter l’exploration du Qwango. en remontant cette rivière jusqu’au point où le major von Mechow l’avait descendue. Vers la fin de 1885, le docteur Bütiner. voulant combler la lacune qui existait encore dans


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notre connaissance du cours de la rivière, entre le point où l’avait laissée le major von Mechow ct celui que le lieutenant Massari disait avoir atteint, suivit à pied la rive du Qwango depuis les rapides de Kingoundji jusue par 4° 30’ de latitude sud. À sa grande surprise, 11 dut constater que la rivière, au lieu de continuer à courir vers le nord, inclinait toujours davantage à l’est et semblait devoir s’aller déverser directement dans le Congo près de Stanley Pool. Le fait parut si étonnant, qu’on se prit à douter que le docteur Büttner eût bien vu. Pendant une année entière, l’incerlitude plana sur cette question, Enfin, au mois de décembre 1886, le révérend Grenfell, accompagné du docteur Mense, après s’être assuré qu’aucune rivière importante ne débouchait sur la rive gauche du Congo, entre Stanley Pool et Kwamouth, atteignit avec son petit steamer, le Peace, le delta par lequel le Qwango se jette dans le Kassaï, S’engageant alors dans le bras occidental du della et pénétrant dans la rivière, les explorateurs ne tardèrent pas à découvrir qu’elle reçoit de droite un affluent, auquel les indigènes donnent le nom de Djouma. Plus haut (par environ 3° 45 de latitude sud}, le Qwango reçoit de droite un autre affluent. qui est probablement le Ouambo {Wambo), dont ont parlé les explorateurs Kund et Tappenbeck. À partir de ce point, le Qwango décrit une grande courbe vers l’ouest, qui le rapproche du Congo et raccorde son cours avec le tracé du docteur Büttner. Le parcours entier a été reconnu par MM. Grenfeli et Mense, qui. après avoir franchi tous les méandres de la rivière, parvinrent enfin aux rapides de Kingoundji, dont la description concorde exactement avee ce qu’en avait dil le major-von Mechow.

VI

Un autre tributaire du Congo dont exploration est du plus grand intérêt, c’est l’’Oubanguï. Non seulement cette rivière marque, d’après les conventions récentes, la frontière entre le Congo français et le Congo belge, mais elle serait, Suivant une certaine hypothèse, le cours inférieur de la rivière Ouellé, qui a ses sources non loin de l’endroit où Le haut Nil sort du lac Albert Nyanza et qui, dans sa course vers l’ouest, arrosc le pays des Niam-Niams ou Zandèh. Malheureusement personne n’a, dans ces derniers temps, remonté l’Oubangui au delà du point qu’avait atteint le révérend Grenfell en 1885, et personne non plus n’a descendu l’Ouellé plus bas que la partie connue d’après les renseignements qu’a rapportés le docteur Junker.

Une tentative très méritoire a été faite par le capilaine van Gèle, vers la fin de l’année 1886. Chargé par le gouvernement de l’État libre du Congo d’explorer l’Oubangui et d’en reconnaître les affluents, il remonta celte rivière jusqu’aux rapides de Zongo, situés sous 4° 10’ de latitude nord, 19°6’ de longitude est de Grecnwich (16° 66’ est de Paris). C’était à l’époque des hautes eaux ; son petit steamer, le Henry Reed, ne pouvait pas lutter contre la violence du courant ; tandis que le