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Page:Le bien universel ou les formies mystique Le bien universel ou les formies mystiques, Du celebre Docteur Jean Nider, de l'Ordre des Freres Prescheurs.pdf/31

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sitez temporelles, & de leur famille ; pour exemple, les Artisans : les autres sollicitent afin de se premunir contre la pauvreté, & tous se traversent le cœur & l’esprit de forces inquietudes & soucys moins utiles. Cependant il faut noter, que voir - mesmes ceux qui font profession d’ensevelir les morts, & des autres œuvres de justice Chrestienne & de misericorde, doivent quelquefois entremetre ces exercices, pour vaquer à plus grand bien ; puisque c’est parmy les tenebres & les infections du siecle, qu’ils font ces services : & aussi ils en contractent souvent des coulpes & des imperfections. Car les mondains sont tels, qu’à moins d’estre puissamment armez de plenitude de grace, ou de vertus de tous points heroïques, on ne peut presque jamais traitter avec eux, sans se soüiller de leurs contagieux vices. Voilà pourquoy aussi S. Jean nous assure en son Epistre canonique, que tout ce qui est au monde, est ou concupiscence de la chair, ou concupiscence des yeux, ou superbe de vie, ou de conversation.

Premierement donc pour imiter les Formies, ou pour faire proufit de leur exemple ; il faut ensevelir les morts, & faire les autres œuvres de misericorde corporelle, selon lesquelles nostre Sauveur nous avise, qu’au jour du jugement general il nous adjugera ou aux gehennes d’enfer, ou à la gloire de la felicité eternelle. Nous en rencontrons bien journellement, & à toutes heures des occasions ; car chacun se ressent affligé d’infirmité ou corporelle ou spiriruelle : & plusieurs en sont à la mort, & d’autres comme morts : de maniere que nous pouvons chanter, comme font plusieurs Eglises, à sçavoir, qu’au milieu de la carriere de nostre vie, nous nous ressentons dans les atteintes de la mort. En effect, c’est seulement au ciel en la jouyssance de Dieu, ou en la felicité eternelle, qu’on possede vraiement la vie : & de mesme qu’en enfer, au contraire, les reprouvez sont dans les eternelles horreurs de la mort. Mais en ce monde, la mort jouit de si grand & si puissant ascendant sur la vie, qu’au milieu de nostre vie nous devons nous recognoitre à la mort. Voilà pourquoy nostre Seigneur appellant ses disciples pour les adresser à la vraie vie, leur dit ces paroles : suivez moy, & permettez aux morts d’ensevelir leurs morts[1]. Ce qui faict conclure à S. Bernard, qu’on doit quelquesfois pour des plus grands biens, entremettre les moindres.

Secondement, les Formies s’emploient és travaux & labeurs utils ; & de mesme les peuples vaquans aux services des œuvres

  1. S. Mat, chap. 8.