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DICTIONNAIRE
DE
L’ACADÉMIE FRANÇOISE.

A. Lettre voyelle, qui forme à elle seule un mot présentant plusieurs acceptions.

A. Lettre. subst. mas. Premier caractère de notre alphabet. Dans presque tous les alphabets l’A précède le B.

Ce caractère reçoit différentes formes, soit dans l’impression, soit dans l’écriture manuelle. L’A majuscule. Le petit a. L’A romain. L’A italique.

C’est un nom indéclinable, qui ne prend pas, comme presque tous les noms, une S au pluriel. On écrit deux A, et non pas deux AS.

On dit communément De quelqu’un qui ne sait pas lire, et figurément De quelqu’un qui est fort ignorant, qu’Il ne sait ni A, ni B.

On dit, Une panse d’A, pour dire, Le commencement de la formation de la lettre A, qui, dans l’écriture ordinaire, s’écrit a. Et dans ce sens, quand on a donné quelque chose à écrire à quelqu’un, et qu’il n’y a point encore travaillé, on dit proverbialement qu’Il n’en a pas fait une panse d’a. La même chose se dit figurément, pour donner à entendre qu’Un homme qui avoit entrepris de composer quelque ouvrage, n’y a point encore travaillé. On dit aussi, pour signifier qu’Un homme n’a nulle part à un ouvrage d’esprit qu’on lui attribue, qu’Il n’y a pas fait une panse d’a.

On dit aussi figurément, Depuis A jusqu’à Z, pour dire, Depuis le commencement d’une chose jusqu’à la fin.

A. Son. s. m. Le son de l’A est celui qui se prononce par le mouvement le plus naturel de la bouche ; aussi entre-t-il dans les premiers mots que prononcent les enfans dans toutes les Langues. Papa, mama. Le son de l’A, en françois, est le même dans tous les mots : il ne diffère que par sa durée et par des nuances peu sensibles. Il est long ou bref ; long dans Trâme, grâce ; bref dans Glace, trace.

Dans les deux précédentes acceptions, A est un nom substantif masculin. Il n’appartient au verbe que comme troisième personne du présent de l’indicatif du verbe Avoir. Il a de l’esprit. Il a tort. Elle a aimé.

On l’emploie en ce sens dans cette phrase, qui est un gallicisme. Il y a. On dit, Il y a un homme, pour dire, Il existe un homme ; Il y a eu un temps, pour dire, Il fut un temps.

Dans tous les autres cas où l’on emploie le mot A, c’est une Particule qui indique une multitude de rapports, difficiles à nombrer et à classer. En certains cas, la particule A, sert à remplacer le datif du Latin, lorsqu’elle est mise après un mot par lequel elle est régie, et dont elle détermine l’objet : après un verbe, Écrire à quelqu’un ; après un substantif, Soumission à l’autorité ; après un adjectif, Attentif à la leçon ; après un adverbe, Conformément a la règle ; après une simple préposition, Jusqu’à Paris. Dans ce sens il s’unit souvent à l’article le, la, les, et alors il se décline en quelque sorte, puisqu’il se change en au, au lieu de à le, et qu’il a le pluriel aux, au lieu de à les. Obéir au Magistrat, à la Loi ; obéir aux Magistrats, aux Lois. Sous ce même rapport, A s’emploie dans plusieurs phrases elliptiques, lorsqu’un danger ou un intérêt pressant oblige de n’exprimer que l’idée principale, en supprimant des idées accessoires que l’esprit supplée aisément ; comme : Aux armes. À moi. À vous. Au feu. Au meurtre. Au secours.

A, seul, n’est jamais adverbe, comme l’ont avancé quelques Grammairiens ; mais il forme une expression adverbiale, lorsqu’il se joint à un adverbe ou à certains noms adjectifs ou substantifs ; à un adverbe, comme, Durer à jamais, venir à rien, à un adjectif, Tomber à bas, à tort ou à droit ; à un substantif, Parler à propos. Parler tête à tête. Mal à propos. Crier à tue-tête, à pleine tête. Tirer à brûle-pourpoint. Haïr à mort, à la mort. Être blessé à mort. Marcher à tâtons. Aller à reculons. Travailler à bâtons rompus. Juger à la boulevue. Décider à la