Page:Le journal de la jeunesse Volume I, 1873.djvu/128

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tantôt rampant sur le sol et tirant sa carabine après lui, tantôt s’élançant rapidement derrière un arbre ou un buisson pour se mettre à couvert derrière un autre, jusqu’à ce qu’enfin il fut à courte portée de l’ennemi. Il reconnut Slippery Jack lui-même. Abattant aussitôt son fusil, il visa et fit feu: l’homme fit un bond et retomba roide mort. Sachant que la détonation donnerait l’éveil à ses compagnons, nous nous élançâmes aussitôt et arrivâmes sur eux avant qu’ils eussent eu le temps de courir à leurs armes. Les tenant au bout de nos revolvers, nous leur dîmes que, leur chef étant mort, nous leur ferions grâce de la vie s’ils se rendaient. Ils étaient complétement démoralisés, et nous n’eûmes qu’à leur lier les mains avec une branche d’osier que nous trouvâmes sur le bord de l’eau.

Cela fait, nous attachâmes nos prisonniers sur leurs propres chevaux, nous les chassâmes devant nous jusqu’à ce que nous trouvâmes un bon campement pour la nuit. Deux d’entre nous retournèrent enterrer le corps du malheureux Slippery Jack, pendant que deux autres veillaient sur nos prisonniers.

Le lendemain nous rejoignîmes nos compagnons, qui furent ravis du succès de notre expédition. Continuant notre voyage, nous arrivâmes bientôt à William’s Lake, où nous abandonnâmes nos trois captifs aux tristes rigueurs de la loi. De William’s Lake nous nous dirigeâmes vers la Quesnelle. C’est des deux côtés de cette rivière que s’étend le riche district minier du Caribou.

Il nous restait, après avoir traversé la Quesnelle, environ soixante milles (96 kilomètres) à faire pour atteindre William’s Creek; mais quelle route! Il est impossible de donner une idée de ce qu’était alors ce chemin. Ici un marais, océan de boue dont les écueils étaient des racines ou des troncs d’arbres; là les flancs glissants d’une montagne, détrempés par la fonte des neiges et par une pluie fine qui tombait en moyenne trois jours sur quatre; plus loin, entre Antler Creek et William’s Creek, la Bald Mountain (montagne Chauve) de sept ou huit mille pieds, et dont les sommets, même vers la fin de juin, étaient couverts de neige. Chaque nuit un froid vif durcissait assez la neige pour qu’on pût y marcher le matin, avant que la chaleur fût assez forte pour la fondre.

Nos mules ne pouvant venir jusque-là, il nous fallut les vendre à Keithley’s Creek pour la moitié de ce qu’elles valaient, diviser nos bagages en paquets de quatre-vingts livres, les charger sur notre dos et faire deux fois, ainsi chargés, ce pénible voyage.

Enfin, après seize jours de fatigues inouïes, nous nous trouvâmes sains et saufs, avec nos bagages, à William’s Creek, où nous commençâmes par nous accorder deux jours d’un repos indispensable.

A suivre.

R. B. Johnson

Traduit de l'anglais par A. Talandier.

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LIVINGSTONE¹

Nous avons raconté les excursions de Livlngstone dans l'Afrique australe. Après avoir fait de Linyanti, capitale des Makololos, le siégé de sa résidence, il s'est porté'd'abord vers l'Atlantique, pùis après ètre revenu à Linyanti, il a gagné les bords de l'océan Indien, à l'embouchure du Zambèse, traversait ainsi, dans toute sa largeur, le vaste continent africain. Le succès de ce prodigieux voyage est du à la réunion des qualités les plus rares dans celui qu'il avart entrepris' une- persévérance; un courage" à' totilft. épreuve, une grande fermeté de caractère qui imposait aux indigènes; une équité", une modération qui apaisaient leur défiance et lui conciliaient leur sym̃pathie. Livingstone n'a pas été moins 'utile à la civilisation qu'à la science : il a réhabilité le nom européen, parmi les populations africaines pil a, sinon détruit, y-àn ïno{ns.y)é beaucoup affaibli les sentiments dp'tei'Teur'etidjî'hainè que ce nom réveillait; il a jeté 'au scindes trjbusleî-plus'grossières des germes d'amélioration qui ne tarderont pas à fructifier. Lijingslori'en unmoC, a justifié, dans le sens le plus ̃'largCÈtJb 'plus" philosophique, son beau titre demis-1 sionrfaire."1

En 1858, notre grand explorateur retournait à l'ehboÙJchuVe du Zambèse, accompagné de sa femme, de ses enfants, de son frère Charles et du docteur Kirl; son absence devait se prolonger six années; son but p/incipaï' était d'étudier le cours du Zanbese et pélùi de ses affluents de gauche. Il remonta ï'é fletiy^e. à l'aide d'un batcau à vapeur, et retrouva à Tété sés^ànfiiens compagnons de voyage, les Makololos,qui faillirent mourir de joie ils allaient se précipiter dans ses bras, mais une crainte assez, plaisante retint leur expansion « Ne le touchons pas, se disaient-ils les uns aux autres, nous gâterions ses habits neufs »

Il salua de nouveau, sur son passage, les chutes de Victoria, se rendit à Linyanti, et fut accueilli avec la même bienveillance par le pauvre monarque nègre, alors malade de la lèpre.

Il entra dans l'un des affluents du Zambèsé, la rivière Chire. Sur sa route s'offraient des peuplades aux mœurs originales et variées.

Certains indigènes sont fous d'ornements bagues à tous les doigts, anneaux aux jambes, en laiton, en fer, en cuivre. Les femmes portent, à la lèvre supérieure, un anneau nommé pélelé, dont le diamètre a 5 centimètres.

En approchant du lac Nyassa, on dut traverser des pays qui avaient été' cruellement exploités par les traitants portugais. Chaque village, à la vue des ̃voyageurs, prenait une attitude menaçante. Ainsi sur