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Page:Le judaïsme avant Jésus-Christ.pdf/53

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La sagesse politique était dans un embarras cruel. Il était impossible de lutter à la fois contre l’Égypte et contre le nouvel empire babylonien, héritier de la puissance assyrienne. Fallait-il donc opter et joindre la fortune de Juda à celle de l’un des potentats qui se disputaient ce petit pays, éternelle balle que chacun d’eux ramenait tour à tour dans son camp ?

La sagesse inspirée des prophètes conseillait une politique d’attente, confiante dans le secours de Dieu. Le pieux roi Josias avait été mal inspiré en barrant le chemin à Néchao, roi d’Égypte, montant à la rencontre des gens du nord[1]. Depuis que Nabuchodonosor, roi de Babylone, avait inauguré un règne irrésistible, il n’y avait qu’à se tenir cois, acceptant la sujétion inévitable qui serait relativement douce. Le roi de Juda Joakim l’avait d’abord compris. Il se révolta, fut enchaîné et conduit à Babylone avec un premier lot de captifs, vers l’an 604. av. J.-C.

Fidèle aux anciennes traditions, Nabuchodonosor laissa régner Joachin, âgé de dix-huit ans, fils du roi vaincu. Révolte de Joachin au bout de trois mois, nouvelle intervention des Chaldéens ; Jérusalem se défend mollement, elle est prise et pillée (598 av. J.-C.) ; dix mille captifs sont traînés en Babylonie[2].

Le jeune téméraire fut remplacé par son oncle, Mathanias, que Nabuchodonosor nomma Sédécias. Celui-ci se tint tranquille durant neuf ans. Puis il se révolta. Le siège de Jérusalem commença aussitôt et dura deux ans. Les Judéens le soutinrent avec intrépidité, à la fois confiants aveuglément dans l’aide miraculeuse de Iahvé et sourds à la parole de son prophète Jérémie. Le désastre fut complet. La ville prise, le temple et le palais incendiés, après les premières exécutions l’élite de la nation fut emmenée en Babylonie. Le gros du peuple resta en Judée sous le commandement d’un gouverneur, instrument de la domination étrangère.

Godolias, un judéen, s’installa à Maspha[3], d’où il pouvait surveiller les ruines de Jérusalem et les confins de l’ancien royaume du nord. Mais des nationalistes forcenés le massacrèrent avec sa garde de Chaldéens et d’Israélites soumis. Après ce coup désespéré, ils s’enfuirent en Égypte, entraînant avec eux Jérémie, suspect de pactiser avec les Babyloniens. Ce n’est pas de cette bande, renforcée de chefs militaires et d’un peuple nombreux, que devait venir la restauration. Nous les retrouverons plus tard en Égypte pour juger, à la mesure de cet échec, le caractère extraordinaire et vraiment divin de la création du Judaïsme par les réfugiés et les captifs de Babylone.

  1. II Rois, xxiii, 28 ss.
  2. II Rois, xxiv, 10 ss.
  3. Aujourd’hui Tell Naṣbeh, à 13 kilom. au nord de Jérusalem.