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Page:Le judaïsme avant Jésus-Christ.pdf/561

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il est probable qu’il fait allusion à un fait historique. M. Perdrizet[1] a cru reconnaître un trait caractéristique d’authenticité dans ce détail que les Juifs devaient être marqués au fer rouge d’une feuille de lierre, emblème de Dionysos (IIIMacch., n, 28-29). Or Philopator fut un dévot passionné de Bacchos-Dionysos. S’il n’introduisit pas ce culte en Égypte, du moins il le favorisa et lui donna une organisation officielle[2]. Toutefois, l’impulsion une fois donnée, un autre Lagide put la poursuivre. Philopator n’est pas indiqué pour le rôle de persécuteur des Juifs. Au moment où ils étaient encore sous le sceptre des rois égyptiens à Jérusalem comme en Égypte, il eùt été de mauvaise politique de les pousser à se tourner vers la Syrie qui avait commencé son mouvement d’invasion vers le sud.

Physcon, nommé par Josèphe, est désigné par ses démêlés avec les Juifs, qui avaient pris le parti de sa mère Ciéopàtre (c. Ap., II, 52). Il serait tout naturel que sa colère fût tombée de préférence sur les Juifs, « qu’il pouvait massacrer sans risquer de déplaire au peuple[3]. Le motif de l’hostilité du roi aurait donc été plus politique que religieux, ce qui n’a rien d’invraisemblable[4].

Le caractère d’une tentative de pousser les Juifs à l’apostasie n’est nullement souligné par Josèphe, tandis que le thème de III Macchabées est de fortifier les Juifs dans la foi.

Qu’un Ptolémée se soit comporté comme Antiochus Épiphane et dans le comble de son exaspération, il faudrait pour l’admettre un autre témoignage que la légende absurde de III Macchabées. Quant au dessein de haute politique que prête M. Perdrizet à Philopator, il n’yen a pas de trace, même dans cette mauvaise pièce. Le roi aurait voulu procurer l’unité de religion dans son empire, et Sarapis n’ayant pas réussi dans le rôle de dieu unique, il aurait donné la préférence à Dionysos. C’était, pense-t-on, fairJ une avance aux Juifs, car leur dieu Sabaoth était identifié par les païens avec Sabazios, un autre nom de Dionysos. L’hypothèse est séduisante, et peut-être explique-t-elle pourquoi le séleucide Épiphane a prétendu imposer aux Juifs les rites de Dionysos-

  1. Le fragment de Satyros sur les dèmes d’Alexandrie (dans Revue des études anciennes, 1910, p. 217-247).
  2. C’est le sens que M. P. Roussel donne à l’édit de Philopator, publié par Schubart, Einführung in die Papyruskunde (Berlin, 1918, p. 352) : « il institue un culte officiel du dieu ».Il ne s’agit donc pas proprement de mystères, et en tout cas le texte de la doctrine sacrée (ὁ ἱερὸς λόγος) que les initiateurs devaient remettre scellé n’est pas le secret propre d’un mystère, mais la tradition pieuse dont cependant les prêtres s’attribuaient la transmission (Un édit de Ptolémée Philopator, dans Comptes rendus de l’Académie des Inscr. et B. L., 1919, p. 237-243).
  3. Bouché-Leclercq, Histoire des Lagides, {sc|ii}}, p. 61.
  4. C’est aussi l’opinion de Heinemann (l. l., c. 7 s.), mais en supposant comme roi Ptolémée Lathyre, vers 88 av. J.-C., pure hypothèse qui ne s’appuie que sur la date approximative de Jordanis.