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les mille nuits et une nuit

posséder la terre entière, tu peux, dès à présent, aller faire tes adieux à tes parents et leur dire que le pal t’attend ! »

À ces paroles du roi Kendamir, le conteur Abou-Ali comprit qu’il était perdu sans recours, et répondit : « J’écoute et j’obéis ! » Et il baissa la tête, bien jaune de teint, en proie au désespoir sans remède. Mais au bout d’un certain temps il releva la tête et dit : « Ô roi du temps, ton esclave l’ignorant demande une grâce de ta générosité, avant de mourir ! » Et le roi demanda : « Et quelle est-elle ? » Il dit : « C’est de lui accorder seulement un délai d’un an pour lui permettre de trouver ce que tu lui demandes. Mais si, ce délai passé, le conte en question n’est pas trouvé, et si, trouvé, il n’est pas le plus beau, le plus merveilleux et le plus extraordinaire qui soit parvenu à l’oreille des hommes, je subirai, sans amertume en mon âme, le supplice du pal ! »

À ces paroles, le roi Kendamir se dit : « Ce délai est bien long ! Et nul homme ne sait s’il doit vivre encore le lendemain ! » Puis il ajouta : « Pourtant, mon désir est si grand d’entendre encore une histoire, que je t’accorde ce délai d’un an ; mais c’est à condition que tu ne bouges pas de ta maison, durant ce laps de temps ! » Et le conteur Abou-Ali baisa la terre entre les mains du roi, et se hâta de s’en retourner à sa maison.

Là, après avoir longtemps réfléchi, il appela cinq de ses jeunes mamalik, qui savaient lire et écrire, et qui, en outre, étaient les plus sagaces, les plus dévoués et les plus distingués d’entre tous ses serviteurs, et leur remit à chacun cinq mille dinars