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les mille nuits et une nuit

bien qu’il l’eût fait mettre de côté pour lui-même, dès le jour de l’achat, se la réservant comme un morceau de choix. Et il mit à la disposition des nouveaux mariés un bel appartement, dans le palais, proche voisin du sien, et magnifiquement meublé et pourvu de toutes les commodités. Et, après leur avoir souhaité toutes les délices pour la nuit, il les laissa seuls, et rentra dans son harem.

Or, la jeune fille s’étant dévêtue attendit, couchée, que vînt à elle son nouveau seigneur. Et le cheikh cultivateur, qui de sa vie n’avait vu ni goûté de la chair blanche, s’émerveilla de ce qu’il voyait et glorifia en son cœur Celui qui forme la chair blanche. Et il s’approcha de la jeune fille, et se mit à folâtrer avec elle de toutes les folâtreries usuelles en un cas comme celui-là. Et voilà que, sans qu’il pût savoir ni comment ni pourquoi, l’enfant-de-son-père ne voulut pas lever la tête, et resta assoupi avec un œil sans vie et tourné en bas. Et le fruitier eut beau l’admonester et l’encourager, il ne voulut rien entendre et resta insoumis. Opposant à toutes les exhortations une inertie et un entêtement inexplicables. Et le pauvre fruitier fut à la limite de la confusion et s’écria : « En vérité, c’est là une affaire prodigieuse ! » Et la jeune fille, dans le but de réveiller les désirs de l’enfant, se mit à badiner avec lui et à jouer avec lui à la main chaude, et à le câliner de toutes les câlineries, et à le raisonner tantôt par les caresses et tantôt par les bourrades, mais elle ne réussit guère davantage à le décider au réveil. Et elle finit par s’écrier : « Ô mon maître, puisse Allah développer le progrès ! » Et, voyant que