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Page:Le livre des mille nuits et une nuit, Tome 13, trad Mardrus, 1903.djvu/124

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les mille nuits et une nuit

épouse, il cohabita avec moi selon l’usage. Mais Allah ne le favorisa pas de la fécondité, et je ne pus lui donner une postérité qui lui apportât de la joie et assurât le trône à sa race. Et, quand il vit qu’il n’avait pas d’enfants, il fut plongé dans une tristesse qui lui fit perdre l’appétit, le sommeil et la santé. Et il fut travaillé par sa mère qui le poussait à prendre sur moi une autre épouse. Et il prit sur moi une seconde épouse. Mais Allah ne le favorisa pas de la fécondité. Et il fut de nouveau conseillé par sa mère pour une troisième femme. Alors, moi, voyant que j’allais finir par être reléguée au dernier rang, et que d’ailleurs cela n’avancerait en rien l’état du sultan, je résolus de sauver mon influence en sauvant, du même coup, l’héritage du trône. Et je n’attendis que l’occasion propice pour réaliser cette excellente intention.

« Or, un jour, le sultan, qui continuait à n’avoir aucun appétit et à maigrir, eut une grande envie de manger un poulet farci. Et il donna l’ordre au cuisinier d’égorger un des volatiles qui étaient enfermés dans des cages sous les fenêtres du palais. Et l’homme vint pour prendre la volaille dans sa cage. Alors moi, ayant bien examiné ce cuisinier, je le trouvai tout à fait convenable pour l’œuvre projetée, car c’était un gaillard jeune, carré et gigantesque. Et, me penchant à la fenêtre, je lui fis signe de monter par la porte secrète. Et je le reçus dans mon appartement. Et ce qui se passa entre moi et lui ne dura qu’un temps fort restreint, car, aussitôt qu’il eût fini son affaire, je lui plongeai dans le cœur un poignard. Et il tomba à la renverse, sa tête précédant