Aller au contenu

Page:Le livre des mille nuits et une nuit, Tome 13, trad Mardrus, 1903.djvu/147

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
histoire de l’adultérin… (le singe…)
139

mon sort et dire mon horoscope, et lui jetai un salam, qu’il me rendit. Et je m’assis par terre sur mes jambes repliées, m’accroupis en face de lui, et le priai de consulter pour moi l’invisible.

Alors le Maghrébin, après m’avoir considéré avec des yeux où passaient des lames de couteau, s’exclama : « Ô derviche, est-ce bien toi qui as été la victime d’une exécrable fatalité qui t’a séparé d’avec ton épouse ? » Et je m’écriai : « Hé, ouallah ! hé, ouallah ! c’est moi-même ! » Il me dit : « Ô pauvre, le singe que tu as acheté cinq drachmes d’argent, et qui s’est métamorphosé si subitement en un jouvenceau plein de grâce et de beauté, n’est pas un être humain d’entre les fils d’Adam, mais un genni de mauvaise qualité. Et il ne s’est servi de toi que pour arriver à ses fins. Sache, en effet, qu’il est, depuis longtemps, passionnément épris de la fille du sultan, celle-là même qu’il t’a fait épouser. Mais comme, malgré toute sa puissance, il ne pouvait s’en approcher parce qu’elle portait sur elle un bracelet-talisman, il a employé ton entremise pour obtenir ce bracelet, et se rendre impunément maître de la princesse. Mais j’espère avant peu détruire le pouvoir dangereux de ce mauvais sujet, qui est un des genn adultérins, qui se sont révoltés contre la loi de notre seigneur Soleïmân — sur Lui la prière et la paix ! »

Et, ayant ainsi parlé, le Maghrébin prit une feuille de papier, y traça des caractères compliqués, et me la remit en disant : « Ô derviche, ne doute pas de la grandeur de ton destin, reprends courage et va à l’endroit que je vais t’indiquer. Et là tu attendras le