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Page:Le livre des mille nuits et une nuit, Tome 13, trad Mardrus, 1903.djvu/200

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les mille nuits et une nuit

livrai mes jambes au vent, sans regarder derrière moi, et j’arrivai, hors d’haleine, dans ma boutique où m’attendait toujours l’adolescente du parfait amour. Et elle, de sa langue la plus douce, elle me souhaita la bienvenue, et, de toute la bienséance de ses manières, elle me félicita de la réussite, et me dit : « Maintenant, voici le moment venu de notre réunion. Qu’en penses-tu, ô mon maître ? » Et je répondis : « Sera-ce dans ma boutique ou dans ta maison ? » Et elle sourit et me dit : « Ô pauvre ! mais tu ne sais donc pas combien une femme doit prendre de soins de sa personne, pour faire les choses comme il sied ? Il faut donc que ce soit dans ma maison ! » Et je répondis : « Par Allah, ô ma souveraine, depuis quand le lys va-t-il au hammam et la rose au bain ? Ma boutique est assez grande pour te conteuir, lys ou rose. Et si ma boutique brûlait, il y aurait mon cœur. » Et elle me répondit, riant : « Tu excelles, vraiment ! Et te voilà revenu de tes anciennes manières, si ordinaires ! Et tu sais tourner un compliment, parfaitement. » Et elle ajouta : « Maintenant, lève-toi, ferme ta boutique et suis-moi. »

Or, moi, qui n’attendais que ces mots, je me hâtai de répondre : « J’écoute et j’obéis. » Et, sortant le dernier de la boutique, je la fermai à clef, et suivis, à dix pas de distance, le groupe formé par l’adolescente et ses esclaves. Et nous arrivâmes de la sorte devant un palais dont la porte s’ouvrit à notre approche. Et, dès l’entrée, deux eunuques vinrent à moi et me prièrent de me rendre avec eux au hammam. Et moi, décidé à tout faire sans demander d’explication, je me laissai conduire par les eunuques