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Page:Le livre des mille nuits et une nuit, Tome 13, trad Mardrus, 1903.djvu/309

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histoire d’ali baba…
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Or, pendant ce temps, Morgane continuait à mettre son plan à exécution.

En effet, elle s’était dit : « Ma fille, ça n’est pas tout que de faire passer une mort violente pour une mort naturelle, il s’agit de parer à un danger plus grand ! Et c’est de ne pas laisser les gens s’apercevoir que le défunt est divisé en six quartiers ! Sans quoi, la gargoulette ne restera pas sans fêlure ! »

Et, sans tarder, elle courut chez un vieux savetier du quartier qui ne la connaissait pas, et tout en lui souhaitant le salam, elle lui mit dans la main un dinar d’or, et lui dit : « Ô cheikh Mustapha, ta main nous est nécessaire aujourd’hui ! » Et le vieux savetier, qui était un bonhomme plein d’entrain et de gaieté, répondit : « Ô journée bénie par ta blanche venue, ô visage de lune ! Parle, ô ma maîtresse, et je te répondrai sur ma tête et mes yeux’. » Et Morgane dit : « Ô mon oncle Mustapha, lève-toi simplement et viens avec moi. Mais avant, prends, si tu veux bien, tout ce qui t’est nécessaire pour coudre le cuir ! » Et lorsqu’il eut fait ce qu’elle lui demandait, elle prit un bandeau et lui en banda soudain les yeux, en lui disant : « C’est la condition nécessaire ! Sans quoi rien n’est fait ! » Mais il se récria, disant : « Vas-tu, ô jeune fille, pour un dinar, me faire renier la foi de mes pères, ou commettre quelque larcin ou crime extraordinaire ? » Mais elle lui dit : « Éloigné soit le Malin, ô cheikh ! Que ta conscience soit en repos ! Ne redoute rien de tout cela, car il s’agit seulement d’un petit travail de couture ! » Et, ce disant, elle lui glissa dans la main une seconde pièce d’or, qui le décida à la suivre.